Paroles de chansons de Georges Brassens Original is here ? http://www.ensem.u-nancy.fr/~mbensaie/brassens/paroles.html Attention! No cyrillic, only Franch is here! You should switch off cyrillic fonts and switch to Western (Latin-1) "Document Encoding" in your browser if you want normally look at this page! Paroles de chansons de Georges Brassens Les Passantes (PoÈme de Antoine Pol) Je veux dÉdier ce poÈme A toutes les femmes qu'on aime Pendant quelques instants secrets A celles qu'on connait À peine Qu'un destin diffÉrent entraÎne Et qu'on ne retrouve jamais A celle qu'on voit apparaÎtre Une seconde À sa fenÊtre Et qui, preste, s'Évanouit Mais dont la svelte silhouette Est si gracieuse et fluette Qu'on en demeure Épanoui A la compagne de voyage Dont les yeux, charmant paysage Font paraÎtre court le chemin Qu'on est seul, peut-Être, À comprendre Et qu'on laisse pourtant descendre Sans avoir effleurÉ sa main A celles qui sont dÉjÀ prises Et qui, vivant des heures grises PrÈs d'un Être trop diffÉrent Vous ont, inutile folie, LaissÉ voir la mÉlancolie D'un avenir dÉsespÉrant ChÈres /~mbensaie/images aperÇues EspÉrances d'un jour dÉÇues Vous serez dans l'oubli demain Pour peu que le bonheur survienne Il est rare qu'on se souvienne Des Épisodes du chemin Mais si l'on a manquÉ sa vie on songe avec un peu d'envie A tous ces bonheurs entrevus Aux baisers qu'on n'osa pas prendre Aux coeurs qui doivent vous attendre Aux yeux qu'on n'a jamais revus Alors, aux soirs de lassitude Tout en peuplant sa solitude Des fantÔmes du souvenir On pleure les lÊvres absentes De toutes ces belles passantes Am G F G A Que l'on n'a pas su retenir L'Auvergnat Elle est aù toi cette chanson Toi l'auvergnat qui sans facons M'as donne quatre bouts de bois Quand dans ma vie il faisait froid Toi qui m'as donne du feu quand Les croquantes et les croquants Tous les gens bien intentionnes M'avaient ferme la porte au nez Ce n'etait rien qu'un peu de bois Mais il m'avait chauffe le corps Et dans mon ame il brule encore A la maniere d'un feu de joie Toi l'auvergnat quand tu mourras Quand le croquemort t'emporteras Qu'il te conduise aù travers ciel Au pere eternel Elle est aù toi cette chanson Toi l'hotesse qui sans facons M'as donne quatre bouts de pain Quand dans ma vie il faisait faim Toi qui m'ouvris ta huche quand Les croquantes et les croquants Tous ces gens bien intentionnes S'amusaient aù me voir jeuner Ce n'etait rien qu'un peu de pain Mais il m'avait chauffe le corps Et dans mon ame il brule encore A la maniere d'un grand festin Toi l'hotesse quand tu mourras Quand le croquemort t'emporteras Qu'il te conduise aù travers ciel Au pere eternel Elle est aù toi cette chanson Toi l'etranger qui sans facons D'un air malheureux m'as souri Lorsque les gendarmes m'ont pris Toi qui n'as pas applaudi quand Les croquantes et les croquants Tous ces gens bien intentionnes Riaient de me voir emmener Ce n'etait rien qu'un peu de miel Mais il m'avait chauffe le coeur Et dans mon ame il brule encore A la maniere d'un grand soleil Toi l'etranger quand tu mourras Quand le croquemort t'emporteras Qu'il te conduise aù travers ciel Au père éternel Stances aù un cambrioleur Prince des monte-en-l'air et de la cambriole, Toi qui eus le bon gout de choisir ma maison Cependant que je colportais mes godrioles En ton honneur j'ai compose cette chanson Sache que j'apprecie aù sa valeur le geste Qui te fit bien fermer la porte en repartant De peur que des rodeurs n'emportassent le reste Des voleurs comme il faut c'est rare de ce temps, Tu ne m'as derobe que le stricte necessaire, Delaissant dedaigneux l'execrable portrait Que l'on m'avait offert aù mon anniversaire Quel bon critique d'art mon salaud tu ferais! Autre signe indiquant toute absence de tare, Respectueux du brave travailleur tu n'as Pas cru decent de me priver de ma guitare, Solidarite sainte de l'artisanat. Pour toutes ces raisons vois-tu, je te pardonne Sans arriere pensee apres mur examen Ce que tu m'as vole, mon vieux, je te le donne, Ca pouvait pas tomber en de meilleures mains. D'ailleurs mi qui te parle, avec mes chansonnettes, Si je n'avais pas du rencontrer le succes, J'aurais tout comme toi, pu virer malhonete, Je serais devenu ton complice, qui sait? En vendant ton butin, prends garde au marchandage, Ne vas pas tout lacher en solde au receleurs, Tiens leur la dragee haute en evoquant l'adage Qui dit que ces gens-laù sont pis que les voleurs. Fort de ce que je n'ai pas sonne les gendarmes, Ne te crois pas du tout tenu de revenir, Ta moindre recidive abolirait le charme, Laisse moi je t'en pri', sur un bon souvenir. Monte-en-l'ai mon ami,que mon bien te profite, Que Mercure te preserve de la prison, Et pas trop de remors, d'ailleurs nous sommes quittes, Apres tout ne te dois-je pas une chanson? Post-Scriptum,Si le vol est l'art que tu preferes, Ta seule vocation,ton unique talent, Prends donc pigon sur ru',mets-toi dans les affaires, Et tu auras les flics meme comme chalands. Mourir pour des idées Mourir pour des idées, l'idée est excellente . Moi j'ai failli mourir de ne l'avoir pas eu . car tous ceux qui l'avaient, multitude accablante, En hurlant à la mort me sont tombés dessus . Ils ont su me convaicre et ma muse insolente, Abjurant ses erreurs, se rallie à leur foi Avec un soupçon de réserve toutefois : Mourrons pour des idées d'accord, mais de mort lente, D'accord, mais de mort lente . Jugeant qu'il n'y a pas péril en la demeure, Allons vers l'autre monde en flânant en chemin Car, à forcer l'allure, il arrive qu'on meure Pour des idées n'ayant plus cours le lendemain . Or, s'il est une chose amère, désolante, En rendant l'âme à Dieu c'est bien de constater Qu'on a fait fausse rout', qu'on s'est trompé d'idée, Mourrons pour des idé's d'accord, mais de mort lente, D'accord, mais de mort lente . Les saint jean bouche d'or qui prêchent le martyre, Le plus souvent, d'ailleurs, s'attardent ici-bas . Mourir pour des idées, c'est le cas de le dire, C'est leur raison de vivre, ils ne s'en privent pas . Dans presque tous les camps on en voit qui supplantent Bientôt Mathusalem dans la longévité . J'en conclus qu'ils doivent se dire, en aparté : "Mourrons pour des idé's d'accord, mais de mort lente, D'accord, mais de mort lente ." Des idé's réclamant le fameux sacrifice, Les sectes de tout poil en offrent des séquelles, Et la question se pose aux victimes novices : Mourir pour des idé's, c'est bien beau mais lesquelles ? Et comme toutes sont entre elles ressemblantes, Quand il les voit venir, avec leur gros drapeau, Le sage, en hésitant, tourne autour du tombeau . Mourrons pour des idé's d'accord, mais de mort lente, D'accord, mais de mort lente . Encor s'il suffisait de quelques hécatombes Pour qu'enfin tout changeât, qu'enfin tout s'arrangeât ! Depuis tant de "grands soirs" que tant de têtes tombent, Au paradis sur terre on y serait déjà . Mais l'âge d'or sans cesse est remis aux calendes, Les dieux ont toujours soif, n'en ont jamais assez, Et c'est la mort, la mort toujours recommencé' ... Mourrons pour des idé's d'accord, mais de mort lente, D'accord, mais de mort lente . O vous, les boutefeux, ô vous les bons apôtres, Mourez donc les premiers, nous vous cédons le pas . Mais de grâce, morbleu ! laissez vivre les autres ! La vie est &agrace; peu près leur seul luxe ici bas ; Car, enfin, la Camarde est assez vigilante, Elle n'a pas besoin qu'on lui tienne la faux . Plus de danse macabre autour des échafeauds ! Mourrons pour des idé's d'accord, mais de mort lente, D'accord, mais de mort lente . La Princesse et le Croque-notes Jadis, au lieu du jardin que voici, C'etait la zone et tout ce qui s'ensuit, Des masures des taudis insolites, Des ruines pas romaines pour un sou. Quant aù la faune habitant la dessous C'etait la fine fleur c'etait l'élite. La fine fleur, l'élite du pavé. Des besogneux des gueux des réprouvés, Des mendiants rivalisant de tares, Des chevaux de retour des propres aù rien, Ainsi qu'un croque-note, un musicien, Une épave accrochée aù sa guitare. Adoptée par ce beau monde attendri, Une petite fée avait fleuri Au milieu de toute cette bassesse. Comme on l'avait trouvée pres du ruisseau, Abandonnée en un somptueux berceau, A tout hasard on l'appelait "princesse". Or, un soir, Dieu du ciel, protégez nous! La voila qui monte sur les genoux Du croque-note et doucement soupire, En rougissant quand meme un petit peu: "C'est toi que j'aime et si tu veux tu peux M'embrasser sur la bouche et meme pire ..." "-Tout beau, princesse arrete un peu ton tir, J'ai pas tellement l'étoffe du sayr', Tu a treize ans,j'en ai trente qui sonnent, Gross différence et je ne suis pas chaud Pour tater d'la paille humide du cachot ... -Mais croque-not',j'dirais rien aù personne ..." -N'insiste pas fit-il d'un ton railleur, D'abord tu n'es pas mon genre et d'ailleurs Mon coeur est dejaù pris par une grande ..." Alors princesse est partie en courant, Alors princesse est partie en pleurant, Chagrine qu'on ait boudé son offrande. Y a pas eu détournement de mineure, Le croque-note au matin, de bonne heure, A l'anglaise a filé dans la charette Des chiffonniers en grattant sa guitare. Passant par laù quelques vingt ans plus tard, Il a le sentiment qu'il le regrette. Le Roi Non certe',elle n'est pas bâtie, Non certe',elle n'est pas bâtie Sur du sable,sa dynastie, Sur du sable,sa dynastie. Il y a peu de chances qu'on Détrône le roi des cons. Il peut dormir,ce souverain, Il peut dormir,ce souverain, Sur ses deux oreilles,serein, Sur ses deux oreilles,serein. Il y a peu de chances qu'on Détrône le roi des cons. Je,tu,il,elle,nous,vous,ils, Je,tu,il,elle,nous,vous,ils, Tout le monde le suit,docil', Tout le monde le suit,docil'. Il y a peu de chances qu'on Détrône le roi des cons. Il est possible,au demeurant, Il est possible,au demeurant, Qu'on déloge le shah d'Iran, Qu'on déloge le shah d'Iran, Mais il y a peu de chances qu'on Détrône le roi des cons. Qu'un jour on dise:"C'est fini", Qu'un jour on dise:"C'est fini" Au petit roi de Jordani', Au petit roi de Jordani', Mais il y a peu de chances qu'on Détrône le roi des cons. Qu'en Abyssinie on récus', Qu'en Abyssinie on récus', Le roi des rois,le bon Négus, Le roi des rois,le bon Négus, Mais il y a peu de chances qu'on Détrône le roi des cons. Que,sur un air de fandango, Que,sur un air de fandango, On congédi' le vieux Franco, On congédi' le vieux Franco, Mais il y a peu de chances qu'on Détrône le roi des cons. Que la couronne d'Angleterre, Que la couronne d'Angleterre, Ce soir,demain,roule par terre, Ce soir,demain,roule par terre, Mais il y a peu de chances qu'on Détrône le roi des cons. Que, ça c'est vu dans le passé, Que,ça c'est vu dans le passé, Marianne soit renversé' Marianne soit renversé' Mais il y a peu de chances qu'on Détrône le roi des cons. Le Roi boiteux
Poeme de Gustave Nadaud
Un roi d'Espagne, ou bien de France, Avait un cor, un cor au pied; C'etait au pied gauche, je pense; Il boitait aù faire pitie. Les courtisans, espace adroite, S'appliquerent aù limiter, Et qui de gauche, qui de droite, Il apprirent tous aù boiter. On vit bientot le bénéfice Que cette mode rapportait; Et de l'antichambre aù l'office, Tout le monde boitait,boitait. Un jour, un seigneur de province, Oubliant son nouveau métier, Vint aù passer devant le prince, Ferme et droit comme un peuplier. Tout le monde se mit aù rire, Excepté le roi qui, tout bas, Murmura:"Monsieur,qu'est-ce aù dire ? Je crois que vous ne boitez pas." "Sire, quelle erreur est la votre! Je suis crible de cors; voyez: Si je marche plus droit qu'un autre, C'est que je boite des deux pieds." Quatre-vingt-quinze pour cent La femme qui possède tout en elle Pour donner le goût des fêtes charnelles, La femme qui suscite en nous tant de passion brutale, La femme est avant tout sentimentale . Mais dans la main les longues promenades, Les fleurs, les billets doux, les sèrènades, Les crimes, les foli's que pour ses beaux yeux l'on commet, La transporte, mais... Refrain Quatre-vingt-quinze fois sur cent, La femme s'emmerde en baisant . Qu'elle le taise ou le confesse C'est pas tous les jours qu'on lui déride les fesses . Les pauvres bougres convaincus Du contraire sont des cocus . A l'heure de l'oeuvre de chair Elle est souvent triste, peuchèr ! S'il n'entend le coeur qui bat, Le corps non plus ne bronche pas . Sauf quand elle aime un homme avec tendresse, Toujours sensible alors à ses caresses, Toujour bien disposé', toujours encline à s'émouvoir, Ell' s'emmerd' sans s'en apercevoir . Ou quand elle a des besoins tyranniques, Qu'elle souffre de nymphmani' chronique, C'est ell' qui fait alors passer à ses adorateurs De fichus quart d'heure . Les "encore", les "c'est bon", les "continue" Qu'ell' cri' pour simuler qu'ell' monte aux nues, C'est pure charité, les soupir des anges ne sont En général que de pieux menson(ges) . C'est à seule fin que sont partenaire Se croie un amant extraordinaire, Que le coq imbécile et prétentieux perché dessus Ne soit pas déçu . J'entends aller de bon train les commentaires De ceux qui font des châteaux à Cyth&egrace;re : "C'est parce que tu n'es qu'un malhabile, un maladroit, Qu'elle conserve toujours son sang-froid ." Peut-être, mais les assauts vous pèsent De ces petits m'as-tu-vu-quand-je-baise, Mesdam's, en vous laissant manger le plaisir sur le dos, Chantez in petto... A l'ombre des maris Les dragons de vertu n'en prennent pas ombrage, Si j'avais eu l'honneur de commander aù bord, A bord du Titanic quand il a fait naufrage, J'aurais crié:"Les femm's adultères d'abord!" Ne jetez pas la pierre à la femme adultère, Je suis derrière ... Car, pour combler les voeux, calmer la fievre ardente Du pauvre solitaire et qui n'est pas de bois, Nulle n'est comparable à l'epouse inconstante. Femmes de chefs de gar', c'est vous la fleur des bois. Ne jetez pas la pierre à la femme adultère, Je suis derrière... Quant à vous, messeigneurs, aimez à votre guise, En ce qui me concerne, ayant un jour compris Qu'une femme adultère est plus qu'une autre exquise, Je cherche mon bonheur à l'ombre des maris. Ne jetez pas la pierre à la femme adultère, Je suis derrière... A l'ombre des maris mais, cela va sans dire, Pas n'importe lesquels, je les tri', les choisis. Si madame Dupont, d'aventure, m'attire, Il faut que, par surcroit, Dupont me plaise aussi! Ne jetez pas la pierre à la femme adultère, Je suis derrière... Il convient que le bougre ait une bonne poire Sinon, me ravisant, je détale à grands pas, Car je suis difficile et me refuse à boire Dans le verr; d'un monsieur qui ne me revient pas. Ne jetez pas la pierre à la femme adultère, Je suis derrière... Ils sont loins mes débuts ou, manquant de pratique, Sur des femmes de flics je mis mon dévolu. Je n'étais pas encore ouvert à l'esthétique. Cette faute de gout je ne la commets plus. Ne jetez pas la pierre à la femme adultère, Je suis derrière... Oui, je suis tatillon, pointilleux, mais j'estime Que le mari doit être un gentleman complet, Car on finit tous deux par devenir intimes A force, à force de se passer le relais Ne jetez pas la pierre à la femme adultère, Je suis derrière... Mais si l'on tombe, hélas! sur des maris infames, Certains sont si courtois, si bons si chaleureux, Que, meme apres avoir cessé d'aimer leur femme, On fait encore semblant uniquement pour eux. Ne jetez pas la pierre à la femme adultère, Je suis derrière... C'est mon cas ces temps-ci, je suis triste, malade, Quand je dois faire honneur à certaine pecore. Mais, son mari et moi, c'est Oreste et Pylade, Et, pour garder l'ami, je la cajole encore. Ne jetez pas la pierre à la femme adultère, Je suis derrière... Non contente de me dé plaire, elle me trompe, Et les jours ou, furieux, voulant tout mettre à bas Je cri:"La coupe est pleine, il est temps que je rompe!" Le mari me suppli':"Non ne me quittez pas!" Ne jetez pas la pierre à la femme adultère, Je suis derrière... Et je reste, et, tous deux, ensemble on se flagorne. Moi, je lui dis:"C'est vous mon cocu préféré." Il me réplique alors:"Entre toutes mes cornes, Celles que je vous dois, mon cher, me sont sacrées." Ne jetez pas la pierre à la femme adultère, Je suis derrière... Et je reste et, parfois, lorsque cette pimbeche S'attarde en compagni' de son nouvel amant, Que la nurse est sorti', le mari à la peche, C'est moi, pauvre de moi! qui garde les enfants. Ne jetez pas la pierre à la femme adultère. La cane de Jeanne La cane De Jeanne Est morte au gui l'an neuf, Elle avait fait, la veille, Merveille ! Un oeuf ! La cane De Jeanne Est morte d'avoir fait, Du moins on le prÉsume, Un rhume, Mauvais ! La cane De Jeanne Est morte sur son oeuf Et dans son beau costume De plumes, Tout neuf ! La cane De Jeanne, Ne laissant pas de veuf, C'est nous autres qui eumes Les plumes, Et l'oeuf ! Tous, toutes, Sans doute, Garderons longtemps le Souvenir de la cane de Jeanne Morbleu ! Le mécréant Est-il en notre temps rien de plus odieux, De plus dÉsespÉrant, que de n pas croire en Dieu ? J voudrais avoir la foi, la foi d mon charbonnier, Qui est heureux comme un pape et con comme un panier. Mon voisin du dessus, un certain Blais Pascal, Ma gentiment donnÉ ce conseil amical : Mettez-vous À genoux, priez et implorez, Faites semblant de croire, et bientÔt vous croirez. J me mis À dÉbiter, les rotules À terr, Tous les Ave Maria, tous les Pater Noster, Dans les rus, les cafÉs, les trains, les autobus, Tous les de profindis, tous les morpionibus... Sur ces entrefaits lÀ, trouvant dans les ortis Un soutane À ma taill, je men suis travesti Et, tonsurÉ de frais, ma guitarre À la main, Vers la foi salvatric je me mis en chemin. J tombai sur un boisseau d punaiss de sacristi, Me prenant pour un autre, en choeur, elles mont dit : Mon pÈr, chantez-nous donc quelque refrain sacrÉ, Quelque sainte chanson dont vous avez l secret ! Grattant avec ferveur les cordes sous mes doigts, Jentonnai le Gorille avec Putain de toi. Criant À limposteur, au traÎtre, au papelard, Ells veulnt me fair subir le supplic dAbÉlard, Je vais grossir les rangs des muets du sÉrail, Les bells ne viendront plus se pendre À mon poitrail, GrÂce À ma voix coupÉ jaurai la plac de choix Au milieu des Petits chanteurs À la croix dbois. AttirÉ par le bruit, un dam de CharitÉ, Leur dit : Que faites-vous ? Malheureuss arrÊtez ! Ya tant dhommes aujourdhui qui ont un penchant pervers A prendre obstinÉment Cupidon À lenvers, Tant dhommes dÉpourvus de leurs virils appas, A ceux qui en ont encor ne les enlevons pas ! Ces arguments massu firent un grosse impression, On me laissa partir avec des ovations. Mais, su l chemin du ciel, je n ferai plus un pas, La foi viendra dellmÊme ou ell ne viendra pas. Je nai jamais tuÉ, jamais violÉ non plus, Ya dÉjÀ quelque temps que je vole plus, Si léternel existe, en fin de compte, il voit Qu je m conduis guÈr plus mal que si javais la foi. Les Copains d'abord Non ce n'Était pas le radeau De la mÉduse ce bateau Qu'on se le dise au fond des ports Dise au fond des ports Il navigait en pÈre peinard Sur la grand'mare des canards Et s'app'lait "Les copains d'abord" Les copains d'abord Non, ce n'Était pas le radeau De la MÉduse, ce bateau, Qu'on se le dis' au fond des ports, Dis' au fond des ports, Il naviguait en pÈr' peinard Sur la grand-mare des canards, Et s'app'lait les Copains d'abord Les Copains d'abord. Ses fluctuat nec mergitur C'Était pas d'la litteratur', N'en dÉplaise aux jeteurs de sort, Aux jeteurs de sort, Son capitaine et ses mat'lots N'Étaient pas des enfants d'salauds, Mais des amis franco de port, Des copains d'abord. C'Étaient pas des amis de lux', Des petits Castor et Pollux, Des gens de Sodome et Gomorrh', Sodome et Gomorrh', C'Étaient pas des amis choisis Par Montaigne et La Boeti', Sur le ventre ils se tapaient fort, Les copains d'abord. C'Étaient pas des anges non plus, L'Evangile, ils l'avaient pas lu, Mais ils s'aimaient tout's voil's dehors, Tout's voil's dehors, Jean, Pierre, Paul et compagnie, C'Était leur seule litanie Leur Credo, leur Confitéor, Aux copains d'abord. Au moindre coup de Trafalgar, C'est l'amitiÉ qui prenait l'quart, C'est elle qui leur montrait le nord, Leur montrait le nord. Et quand ils Étaient en dÉtresse, Qu'leur bras lancaient des S.O.S., On aurait dit les sÉmaphores, Les copains d'abord. Au rendez-vous des bons copains, Y'avait pas souvent de lapins, Quand l'un d'entre eux manquait a bord, C'est qu'il Était mort. Oui, mais jamais, au grand jamais, Son trou dans l'eau n'se refermait, Cent ans aprÈs, coquin de sort ! Il manquait encor. Des bateaux j'en ai pris beaucoup, Mais le seul qui'ait tenu le coup, Qui n'ai jamais virÉ de bord, Mais virÉ de bord, Naviguait en pÈre peinard Sur la grand-mare des canards, Et s'app'lait les Copains d'abord Les Copains d'abord. Le Gorille C'est À travers de larges grilles, Que les femelles du canton, Contemplaient un puissant gorille, Sans souci du qu'en-dira-t-on; Avec impudeur, ces commÈres Lorgnaient mÊme un endroit prÉcis Que, rigoureusement ma mÈre M'a dÉfendu d'nommer ici... Gare au gorille !... Tout À coup, la prise bien close, OÙ vivait le bel animal, S'ouvre on n'sait pourquoi (je suppose Qu'on avait du la fermer mal); Le singe, en sortant de sa cage Dit "c'est aujourd'hui que j'le perds !" Il parlait de son pucelage, Vous avez devinÉ, j'espÈre ! Gare au gorille !... L'patron de la mÉnagerie Criait, Éperdu : "Nom de nom ! C'est assomant car le gorille N'a jamais connu de guenon !" DÈs que la fÉminine engeance Sut que le singe Était puceau, Au lieu de profiter de la chance Elle fit feu des deux fuseaux ! Gare au gorille !... Celles lÀ mÊme qui, naguÈre, Le couvaient d'un oeil dÉcidÉ, Fuirent, prouvant qu'ell's n'avaient guÈre De la suite dans les idÉes; D'autant plus vaine Était leur crainte, Que le gorille est un luron SupÉrieur À l'homme dans l'Étreinte, Bien des femmes vous le diront ! Gare au gorille !... Tout le monde se prÉcipite Hors d'atteinte du singe en rut, Sauf une vielle dÉcrÉpite Et un jeune juge en bois brut; Voyant que toutes se dÉrobent, Le quadrumane accÉlÉra Son dandinement vers les robes De la vielle et du magistrat ! Gare au gorille !... "Bah ! soupirait la centaire, Qu'on puisse encore me dÉsirer, Ce serait extraordinaire, Et, pour tout dire, inespÉrÉ !" Le juge pensait, impassible, "Qu'on me prenne pour une guenon, C'est complÈtement impossible..." La suite lui prouva que non ! Gare au gorille !... Supposez que l'un de vous puisse Être, Comme le singe, obligÉ de Violer un juge ou une ancÈtre, Lequel choisirait-il des deux ? Qu'une alternative pareille, Un de ces quatres jours, m'Échoie, C'est, j'en suis convaicu, la vielle Qui sera l'objet de mon choix ! Gare au gorille !... Mais, par malheur, si le gorille Aux jeux de l'amour vaut son prix, On sait qu'en revanche il ne brille Ni par le goÛt, ni par l'esprit. Lors, au lieu d'opter pour la vielle, Comme aurait fait n'importe qui, Il saisit le juge À l'oreille Et l'entraÎna dans un maquis ! Gare au gorille !... La suite serait dÉlectable, Malheureusement, je ne peux Pas la dire, et c'est regrettable, Ca nous aurait fait rire un peu; Car le juge, au moment suprÊme, Criait : "Maman !", pleurait beaucoup, Comme l'homme auquel, le jour mÊme, Il avait fait trancher le cou. Gare au gorille !... Cupidon s'en fout Pour changer en amour notre amourette, Il s'en serait pas fallu de beaucoup, Mais, ce jour lÀ, VÉnus Était distraite, Il est des jours oÙ Cupidon s'en fout. Des jours oÙ il joue les mouches du coche. OÙ, elles sont ÉmoussÉes dans le bout, Les flÈches courtoises qu'il nous dÉcoche, Il est des jours oÙ Cupidon s'en fout. Se consacrant À d'autres imbÉciles, Il n'eu pas l'heur de s'occuper de nous, Avec son arc et tous ses ustensiles, Il est des jours oÙ Cupidon s'en fout. On tentÉ sans lui d'ouvrir la fÊte, Sur l'herbe tendre, on s'est roulÉs, mais vous Avez perdu la vertu, pas la tÊte, Il est des jours oÙ Cupidon s'en fout. Si vous m'avez donnÉ toute licence, Le coeur, hÉlas, n'Était pas dans le coup; Le feu sacrÉ brillait par son abscence, Il est des jours oÙ Cupidon s'en fout. On effeuilla vingt fois la marguerite, Elle tomba vingt fois sur 'pas du tout'. Et notre pauvre idylle a fait faillite, Il est des jours oÙ Cupidon s'en fout. Quand vous irez au bois conter fleurette, Jeunes galants, le ciel soit avec vous. Je n'eus pas cette chance et le regrette, Il est des jours oÙ Cupidon s'en fout. La mauvaise rÉputation Au village, sans prÉtention, J'ai maivaise rÉputation. Qu' je m' dÉmÈne ou qu' je reste coi Je pass' pour un je-ne-sais-quoi! Je ne fait pourtant de tort À personne En suivant mon de petit bonhomme. Mais les braves gens n'aiment pas que L'on suive une autre route qu'eux, Tout le monde mÉdit de moi, Sauf les muets, Ça va de soi. Le jour du Quatorze Juillet Je reste dans mon lit douillet. La musique qui marche au pas, Cela ne me regarde pas. Je ne fais pourtant de mal À personne, En n'Écoutant pas le clairon qui sonne. Mais les brav's gens n'aiment pas que L'on suive une autre route qu'eux, Tout le monde me montre du doigt Sauf les manchots, Ça va de soi. Quand j' crois' un voleur malchanceux, Poursuivi par un cul-terreux; j' lance la patte et pourquoi le tair', Le cul-terreux s' retrouv' par terr' Je ne fait pourtant de tort À personne, En laissant courir les voleurs de pommes. Mais les brav's gens n'aiment pas que L'on suive une autre route qu'eux, Tout le monde se rue sur moi, Sauf les culs-d'jatt', Ça va de soi. Pas besoin d'etre JÉrÉmie, Pour d'viner l'sort qui m'est promis, s'ils trouv'nt une corde À leur gout, Ils me la passeront au cou, Je ne fait pourtant de tort À personne, En suivant les ch'mins qui n' mÈnent pas À Rome, Mais les brav's gens n'aiment pas que L'on suive une autre route qu'eux, Tout l' mond' viendra me voir pendu, Sauf les aveugl's, bien entendu. Les amoureux des bancs publics Les gens qui voient de travers Pensent que les bancs verts Qu'on voit sur les trottoirs Sont faits pour les impotents ou les ventripotents Mais c'est une absurditÉ Car À la vÉritÉ Ils sont lÀ c'est notoir' Pour accueillir quelque temps les amours dÉbutants Les amoureux qui s' bÉcott'nt sur les bancs publics, Bancs publics, bancs publics, En s' fouttant pas mal du regard oblique Des passants honnetes Les amoureux qui s' bÉcott'nt sur les bancs publics, Bancs publics, bancs publics, En s' disant des " Je t'aim' " pathÉtiqu's Ont des p'tit's gueul' bien sympatiqu's. Ils se tiennent par la main Parlent du lendemain Du papier bleu d'azur Que revetiront les murs de leur chambre À coucher. Ils se voient dÉjÀ doucement Ell' cousant, lui fumant, Dans un bien-etre sur Et choisissant les prÉnoms de leur premier bébé Quand les mois auront passÉ Quand seront apaisÉs Leurs beaux reves flambants Quand leur ciel se couvrira de gros nuages lourds Ils s'apercevront Émus Qu' c'est au hasard des rues Sur un d' ces fameux bancs Qu'ils ont vÉcu le meilleur morceau de leur amour. Quand la saint' famill' machin Croise sur son chemin Deux de ces malappris Ell' leur déoche en passant des propos venimeux N'empech' que tout' la famille Le pÉr' la mÉr' la fille Le fils le saint esprit Voudrait bien de temps en temps pouvoir s' conduir' comme eux. Les Sabots d'HÉlÈne Les sabots d'HÉlÈne Etaient tout crottÉs Les trois capitaines l'auraient appelÉe vilaine Et la pauvre HÉlÈne Etait comme une ame en peine Ne cherche plus longtemps la fontaine Toi qui as besoin d'eau Ne cherche plus, aux larmes d'hÉlÈne Va-t'en remplir ton seau Moi j'ai pris la peine De les dÉchausser Les sabots d'HÉlÈn' moi qui ne sius pas capitaine Et j'ai vu ma peine Bien rÉcompensÉe. Dans les sabots de la pauvre HÉlÈne Dans ses sabots crottÉs Moi j'ai trouve les pieds d'une reine Et je les ai gardÉs. Son jupon de laine Etait tout mitÉ Les trois capitaines l'auraient appelÉe vilaine Et la pauvre HÉlÈne Etait comme une ame en peine Ne cherche plus longtemps la fontaine Toi qui as besoin d'eau Ne cherche plus, aux larmes d'hÉlÈne Va-t'en remplir ton seau Moi j'ai pris la peine De le retrousser Le jupon d'HÉlÈn' moi qui ne suis pas capitaine Et j'ai vu ma peine Bien rÉcompensÉe. Sous les jupons de la pauvre HÉlÈne Sous son jupon mitÉ Moi j'ai trouve des jambes de reine Et je les ai gardÉs. Et le coeur d'HÉlÈne Savait pas chanter Les trois capitaines l'auraient appelÉe vilaine Et la pauvre HÉlÈne Etait comme une ame en peine Ne cherche plus longtemps la fontaine Toi qui as besoin d'eau Ne cherche plus, aux larmes d'hÉlÈne Va-t'en remplir ton seau Moi j'ai pris la peine De m'y arreter Dans le coeur d'HÉlÈn' moi qui ne suis pas capitaine Et j'ai vu ma peine Bien rÉcompensÉe. Dans le coeur de la pauvre HÉlÈne Qu'avait jamais chantÉ Moi j'ai trouve l'amour d'une reine Et je l'ai gardÉ. Brave Margot Margonton la jeune bergère Trouvant dans l'herbe un petit chat Qui venait de perdre sa mÈre L'adopta Elle entrouvre sa collerette Et le couche contre son sein c'Était tout c' quelle avait pauvrette Comm' coussin Le chat la prenant pour sa mÈre Se mit À tÉter tout de go Emue, Margot le laissa faire Brav' margot Un croquant passan À la ronde Trouvant le tableau peu commun S'en alla le dire À tout l' monde Et le lendemain Refrain Quand Margot dÉgrafait son corsage Pour donner la gougoutte À son chat Tous les gars , tous les gars du village Etaient lÀ, la la la la la la Etaient lÀ, la la la la la Et Margot qu'Était simple et trÈs sage PrÉsumait qu' c'Était pour voir son chat qu'les gars , tous les gars du village Etaient lÀ, la la la la la la Etaient lÀ, la la la la la. L' maitre d'École et ses potaches Le mair', le bedeau, le bougnat NÉgligeaient carrÉment leur tache Pour voir Ça Le facteur d'ordinair' si preste Pour voir Ça, n' distribuait plus Les lettre que personne au reste N'aurait lues. Pour voir Ça, Dieu le pardonne, Les enfants de coeur au milieu Du Saint Sacrifice abondonnent Le Saint lieu. Les gendarmes, mem' mes gendarmes Qui sont par natur' si ballots Se laissaient toucher par les charmes Du joli tableau. (au refrain) Une jolie fleur (dans une peau d'vache) Jamais sur terre il n'y eut d'amoureux Plus aveugle que moi dans tous les ages Mais faut dir' qu' je m'Était creuvÉ les yeux En regardant de trop prÈs son corsage. Refrain Un' jolie fleur dans une peau d' vache Un' jolie vach' dÉguisÉe en fleur Qui fait la belle et qui vous attache Puis, qui vous mÈn' par le bout du coeur. Le ciel l'avait pourvue des mille appas Qui vous font prendre feu dÈs qu'on y touche L'en avait tant que je ne savais pas Ne savais plus oÙ donner de la bouche. Ell' n'avait pas de tete, ell' n'avait pas L'esprit beaucoup plus grand qu'un dÉ À coudre Mais pour l'amour on ne demande pas Aux fille d'avoir inventÉ la poudre. Puis un jour elle a pris la clef des champs En me laissant À l'ame un mal funeste Et toutes les herbes de la Saint-Jean N'ont pas pu me guÉrir de cette peste. J' lui en ai bien voulu mais À prÉsent J'ai plus d' rancune et mon coeur lui pardonne D'avoir mis mon coeur À feu et À sang Pour qu'il ne puisse plus servir À personne. Le parapluie  Il pleuvait fort sur la grand-route, Ell' cheminait sans parapluie, J'en avait un, volÉ sans doute Le matin meme À un ami. Courant alors À sa rescousse, Je lui propose un peu d'abri En sÉchant l'eau de sa frimousse, D'un air trÈs doux ell' m'a dit oui. Refrain Un p'tit coin d' parapluie, Contre un coin d' Paradis. Elle avait quelque chos' d'un ange, Un p'tit coin d' Paradis, Contre un coin d' parapluie. Je n' perdait pas au change, Pardi! Chemin faisant que se fut tendre D'ouir À deux le chant joli Que l'eau du ciel faisait entendre Sur le toit de mon parapluie. J'aurais voulu comme au dÉluge, voir sans arret tomber la pluie, Pour la garder sous mon refuge, Quarante jours, Quarante nuits. (au refrain) Mais betement, meme en orage, Les routes vont vers des pays. Bientot le sien fit un barrage A l'horizon de ma foli. Il a fallut qu'elle me quitte, AprÈs m'avoir dit grand merci. Et je l'ai vue toute petite Partir gaiement vers mon oubli. (au refrain) Tonton Nestor Tonton Nestor, Vous êtes tort, Je vous le dis tout net. Vous avez mis La zizani' Aux noces de Jeannett'. Je vous l'avou', Tonton, vous vous Comportâtes comme un Mufle achevé, Rustre fiéffé, Un homme du commun. Quand la fiancé', Les yeux baissés, Des larmes pleins les cils, S'apprêtait à Dire " Oui da ! " A l'officier civil, Qu'est-c' qui vous prit, Vieux malappris, D'aller, sans retenue, Faire un pinçon Cruel en son Eminence charnue ? Se retournant Incontinent, Ell' souffleta, flic-flac ! L' garçon d'honneur Qui, par bonheur, Avait un' tête à claqu', Mais au lieu du " Oui " attendu, Ell' s'écria : " Maman " Et l' mair' lui dit : " Non, mon petit, Ce n'est pas le moment. " Quand la fiancé', Les yeux baissés, D'une voix solennell' S'apprêtait à Dire " Oui da ! " Par-devant l'Eternel, Voila mechef Que, derechef, Vous osâtes porter Votre fichue Patte crochue Sur sa rotondité. Se retournant Incontinent, Elle moucha le nez D'un enfant d'choeur Qui, par bonheur, Etait enchifrené, Mais au lieu du " Oui " attendu, De sa pauvre voix lass', Au tonsuré Désemparé Elle a dit " Merde ", hélas ! Quoiqu'elle usât, Qu'elle abusât Du droit d'être fessu', En la pinçant, Mauvais plaisant, Vous nous avez déçus. Aussi, ma foi, La prochain' fois Qu'on mariera Jeannett', On s' pass'ra d'vous. Tonton, je vous, Je vous le dit tout net. La ballade des cimetières J'ai des tombeaux en abondance, Des sépultur' à discrétion, Dans tout cim'tièr' d' quelque importance J'ai ma petite concession. De l'humble tertre au mausolée, Avec toujours quelqu'un dedans, J'ai des p'tit's boss's plein les allées, Et je suis triste, cependant... Car je n'en ai pas, et ça m'agace, Et ça défrise mon blason, Au cimetièr' du Montparnasse, A quatre pas de ma maison. J'en possède au Père-Lachaise, A Bagneux, à Thiais, à Pantin, Et jusque, ne vous en déplaise, Au fond du cimetièr' marin, A la vill' comm' à la campagne, Partout où l'on peut faire un trou, J'ai mêm' des tombeaux en Espagne Qu'on me jalouse peu ou prou... Mais j' n'en ai pas la moindre trace, Le plus humble petit soupçon, Au cimetièr' du Montparnasse, A quatre pas de ma maison. Le jour des morts, je cours, le vole, Je vais infatigablement, De nécropole en nécropole, De pierr' tombale en monument. On m'entrevoit sous un' couronne D'immortelles à Champerret, Un peu plus tard, c'est à Charonne Qu'on m'aperçoit sous un cyprès... Mais, seul, un fourbe aura l'audace, De dir' : " J' l'ai vu à l'horizon, Du cimetièr' du Montparnasse, A quatre pas de sa maison ". Devant l' château d' ma grand-tante La marquise de Carabas, Ma saint' famille languit d'attente : Mourra-t-ell', mourra-t-elle pas ? L'un veut son or, l'autre veut ses meubles, Qui ses bijoux, qui ses bib'lots, Qui ses forêts, qui ses immeubles, Qui ses tapis, qui ses tableaux... Moi je n'implore qu'une grâce, C'est qu'ell' pass' la morte-saison Au cimetièr' du Montparnasse, A quatre pas de ma maison. Ainsi chantait, la mort dans l'âme, Un jeun' homm' de bonne tenue, En train de ranimer la flamme Du soldat qui lui était connu, Or, il advint qu'le ciel eut marr' de L'entendre parler d' ses caveaux. Et Dieu fit signe à la camarde De l'expédier ru' Froidevaux... Mais les croqu'-morts, qui étaient de Chartre', Funeste erreur de livraison, Menèr'nt sa dépouille à Montmartre, De l'autr' côté de sa maison. L'Enterrement de Verlaine Poème de Paul fort Le revois-tu mon âme, ce Boul' Mich' d'autrefois Et dont le plus beau jour fut un jour de beau froid : Dieu : s'ouvrit-il jamais une voie aussi pure Au convoi d'un grand mort suivi de miniatures ? Tous les grognards - petits - de Verlaine étaient là, Toussotant, Frissonnant, Glissant sur le verglas, Mais qui suivaient ce mort et la désespérance, Morte enfin, du Premier Rossignol de la France. Ou plutôt du second (François de Montcorbier, Voici belle lurette en fut le vrai premier) N'importe ! Lélian, je vous suivrai toujours ! Premier ? Second ? vous seul. En ce plus froid des jours. N'importe ! Je suivrai toujours, l'âme enivrée Ah ! Folle d'une espérance désespérée Montesquiou-Fezensac et Bibi-la-Purée Vos deux gardes du corps, - entre tous moi dernier. Germaine Tourangelle Poème de Paul Fort Cette gerbe est pour vous Manon des jours heureux, Pour vous cette autre, eh ! oui, Jeanne des soirs troublants. Plus souple vers l'azur et déchiré des Sylphes, Voilà tout un bouquet de roses pour Thérèse. Où donc est-il son fin petit nez qui renifle ? Au paradis ? eh ! non, cendre au Père-Lachaise. Plus haut, cet arbre d'eau qui rechute pleureur, En saule d'Orphélie, est pour vous, Amélie. Et pour vous ma douceur, ma douleur, ma folie ! Germaine Tourangelle, ô vous la plus jolie. Le fluide arc-en-ciel s'égrenant sur mon coeur. A Mireille

dit " Petit Verglas "

Poème de Paul Fort Ne tremblez pas, mais je dois le dire elle fut assassinée au couteau par un fichu mauvais garçon, dans sa chambre, là-bas derrière le Panthéon, rue Descartes, où mourut Paul Verlaine. O ! oui, je l'ai bien aimée ma petite " Petit Verglas " à moi si bonne et si douce et si triste. Pourquoi sa tristesse ? Je ne l'avais pas deviné, je ne pouvais pas le deviner. Non, je l'ai su après tu me l'avais caché que ton père était mort sur l'échafaud, Petit Verglas ! J'aurais bien dû le comprendre à tes sourires. J'aurais dû le deviner à tes petits yeux, battus de sang, à ton bleu regard indéfinissable, papillotant et plein de retenue. Et moi qui avais toujours l'air de te dire " Mademoiselle, voulez-vous partager ma statue ? " Ah ! J'aurais dû comprendre à tes sourires, tes yeux bleus battus et plein de retenue. Et je t'appelais comme ça, le Petit Verglas, que c'est bête un poète ! O petite chair transie ! Moi, je l'ai su après que ton père était mort ainsi... Pardonne-moi, Petit Verglas. Volez, les anges ! Le Temps Passé Dans les comptes d'apothicaire, Vingt ans, c'est un' somm' de bonheur. Mes vingt ans sont morts à la guerre, De l'autr' côté du champ d'honneur. Si j' connus un temps de chien, certes, C'est bien le temps de mes vingt ans ! Cependant, je pleure sa perte, Il est mort, c'était le bon temps ! Refrain Il est toujours joli, le temps passé. Un' fois qu'ils ont cassé leur pipe, On pardonne à tous ceux qui nous ont offensés : Les morts sont tous des braves types. Dans ta petit' mémoire de lièvre, Bécassine, il t'est souvenu De notre amour du coin des lèvres, Amour nul et non avenu, Amour d'un sou qui n'allait, certes, Guèr' plus loin que le bout d' son lit. Cependant, nous pleurons sa perte, Il est mort, il est embelli ! J'ai mis ma tenu' la plus sombre Et mon masque d'enterrement, Pour conduire au royaum' des ombres Un paquet de vieux ossements. La terr' n'a jamais produit, certes, De canaille plus consommée. Cependant, nous pleurons sa perte, Elle est morte, elle est embaumée ! La Fille à Cent Sous Du temps que je vivais dans le troisièm' dessous, Ivrogne, immonde, infâme, Un plus soûlaud que moi, contre un' pièc' de cent sous, M'avait vendu sa femme. Quand je l'eus mise au lit, quand j' voulus l'étrenner, Quand j' fis voler sa jupe, Il m'apparut alors qu'j'avais été berné Dans un marché de dupe. " Remball' tes os, ma mie, et garde tes appas, Tu es bien trop maigrelette, Je suis un bon vivant, ça n'me concerne pas D'étreindre des squelettes. Retourne à ton mari, qu'il garde les cent sous, J' n'en fais pas une affaire. " Mais ell' me répondit, le regard en dessous : " C'est vous que je préfère... J' suis pas bien gross', fit-ell', d'une voix qui se nou', Mais ce n'est pas ma faute... " Alors, moi, tout ému, j' la pris sur mes genoux Pour lui compter les côtes. " Toi qu' j'ai payé cent sous, dis-moi quel est ton nom, Ton p'tit nom de baptême ? - Je m'appelle Ninette. - Eh bien, pauvre Ninon, Console-toi, je t'aime. " Et ce brave sac d'os dont j' n'avais pas voulu, Même pour une thune, M'est entré dans le coeur et n'en sortirait plus Pour toute une fortune. Du temps que je vivais dans le troisièm' dessous, Ivrogne, immonde, infâme, Un plus soûlaud que moi, contre un' pièc' de cent sous, M'avait vendu sa femme. Dans l'eau de la claire fontaine Dans l'eau de la claire fontaine Elle se baignait toute nue. Une saute de vent soudaine Jeta ses habits dans les nues. En détresse, elle me fit signe, Pour la vêtir, d'aller chercher Des morceaux de feuilles de vigne, Fleurs de lis ou fleurs d'oranger. Avec des pétales de roses, Un bout de corsage lui fis. Mais la belle était si petite Qu'une seule feuille a suffi. Elle me tendit ses bras, ses lèvres, Comme pour me remercier... Je les pris avec tant de fièvre Qu'ell' fut toute déshabillée. Le jeu dut plaire à l'ingénue, Car, à la fontaine souvent, Ell' s'alla baigner toute nue En priant qu'il fit du vent, Qu'il fit du vent... Je rejoindrai ma Belle * A l'heure du berger, Au mépris du danger, J' prendrai la passerelle Pour rejoindre ma belle, A l'heure du berger, Au mépris du danger, Et nul n'y pourra rien changer. * Tombant du haut des nues, La bourrasque est venue Souffler dessus la passerelle, Tombant du haut des nues, La bourrasque est venue, La passerelle', il y en a plus. * Si les vents ont cru bon De me couper les ponts, J' prendrai la balancelle Pour rejoindre ma belle, Si les vents ont cru bon, De me couper les ponts, J'embarquerai dans l'entrepont. * Tombant du haut des nu's, Les marins sont venus Lever l'ancre à la balancelle, Tombant du haut des nu's, Les marins sont venus, Des balancelle', il y en a plus. * Si les forbans des eaux Ont volé mes vaisseaux, Y me pouss'ra des ailes Pour rejoindre ma belle, Si les forbans des eaux Ont volé mes vaisseaux, J' prendrai le chemin des oiseaux. * Les chasseurs à l'affût Te tireront dessus, Adieu les plumes ! adieu les ailes ! Les chasseurs à l'affût Te tireront dessus, De tes amours, y en aura plus. * Si c'est mon triste lot De faire un trou dans l'eau, Racontez à la belle Que je suis mort fidèle, Et qu'ell' daigne à son tour Attendre quelques jours Pour filer de nouvell's amours. Si le Bon Dieu l'avait voulu Poème de Paul Fort Si le Bon Dieu l'avait voulu - lanturette, lanturlu, - j'aurais connu la Cléopâtre, et je t'aurais pas connue. J'aurais connu la Cléopâtre, et je ne t'aurais pas connue. Sans ton amour que j'idolâtre, las ! que fussé- je devenu ? Si le Bon Dieu l'avait voulu, j'aurais connu la Messaline, Agnès, Odette et Mélusine, et je ne t'aurais pas connue. J'aurais connu la Pompadour, Noémi, Sarah, Rebecca, la Fille du Royal Tambour, et la Mogador et Clara. Mais le Bon Dieu n'a pas voulu que je connaisse leurs amours, je t'ai connue, tu m'as connu - gloire à Dieu au plus haut des nues ! - Las ! que fussé-je devenu sans toi la nuit, sans toi le jour ? Je t'ai connue, tu m'as connu - gloire à Dieu au plus haut des nues ! Le temps ne fait rien à l'affaire Quand ils sont tout neufs, Qu'ils sortent de l'oeuf, Du cocon, Tous les jeunes blancs-becs Prennent les vieux mecs Pour des cons. Quand ils sont d'venus Des têtes chenu's, Des grisons, Tous les vieux fourneaux Prennent les jeunots Pour des cons. Moi, qui balance entre deux âges, J' leur adresse à tous un message : Le temps ne fait rien à l'affaire, Quand on est con, on est con. Qu'on ait vingt ans, qu'on soit grand-père, Quand on est con, on est con. Entre vous, plus de controverses, Cons caducs ou cons débutants, Petits cons d' la dernière averse, Vieux cons des neiges d'antan. Vous, les cons naissants, Les cons innocents, Les jeun's cons Qui n' le niez pas, Prenez les papas Pour des cons, Vous, les cons âgés, Les cons usagés, Les vieux cons Qui, confessez-le, Prenez les p'tits bleus Pour des cons, Méditez l'impartial message D'un type qui balance entre deux âges : La Complainte des Filles de Joie Bien que ces vaches de bourgeois Les appell'nt des filles de joi' C'est pas tous les jours qu'ell's rigolent, Parole, parole, C'est pas tous les jours qu'elles rigolent. Car, même avec des pieds de grues, Fair' les cent pas le long des rues C'est fatigant pour les guibolles, Parole, parole, C'est fatigant pour les guibolles. Non seulement ell's ont des cors, Des oeils-de-perdrix, mais encor C'est fou ce qu'ell's usent de grolles, Parole, parole, C'est fou ce qu'ell's usent de grolles. Y'a des clients, y'a des salauds Qui se trempent jamais dans l'eau. Faut pourtant qu'elles les cajolent, Parole, parole, Faut pourtant qu'elles les cajolent. Qu'ell's leur fasse la courte échell' Pour monter au septième ciel. Les sous, croyez pas qu'ell's les volent, Parole, parole, Les sous, croyez pas qu'ell's les volent. Ell's sont méprisé's du public, Ell's sont bousculé's par les flics, Et menacé's de la vérole, Parole, parole, Et menacé's de la vérole. Bien qu' tout' la vie ell's fass'nt l'amour, Qu'ell's se marient vingt fois par jour, La noce est jamais pour leur fiole, Parole, parole, La noce est jamais pour leur fiole. Bien qu' tout' la vie ell's fass'nt l'amour, Qu'ell's se marient vingt fois par jour, La noce est jamais pour leur fiole, Parole, parole, La noce est jamais pour leur fiole. Fils de pécore et de minus, Ris par de la pauvre Vénus, La pauvre vieille casserole, Parole, parole, La pauvre vieille casserole. Il s'en fallait de peu, mon cher, Que cett' putain ne fût ta mère, Cette putain dont tu rigoles, Parole, parole, Cette putain dont tu rigoles. Les Trompettes de la Renommée Je vivais à l'écart de la place publique, Serein, contemplatif, ténébreux, bucolique... Refusant d'acquitter la rançon de la gloir', Sur mon brin de laurier je dormais comme un loir. Les gens de bon conseil ont su me fair' comprendre Qu'à l'homme de la ru' j'avais des compt's à rendre Et que, sous peine de choir dans un oubli complet, J' devais mettre au grand jour tous mes petits secrets. Refrain Trompettes De la Renommée, Vous êtes Bien mal embouchées ! Manquant à la pudeur la plus élémentaire, Dois-je, pour les besoins d' la caus' publicitaire, Divulguer avec qui, et dans quell' position Je plonge dans le stupre et la fornication ? Si je publi' des noms, combien de Pénélopes Passeront illico pour de fieffé's salopes, Combien de bons amis me r'gard'ront de travers, Combien je recevrai de coups de revolver ! A toute exhibition, ma nature est rétive, Souffrant d'un' modesti' quasiment maladive, Je ne fais voir mes organes procréateurs A personne, excepté mes femm's et mes docteurs. Dois-je, pour défrayer la chroniqu' des scandales, Battre l' tambour avec mes parti's génitales, Dois-je les arborer plus ostensiblement, Comme un enfant de choeur porte un saint sacrement ? Une femme du monde, et qui souvent me laisse Fair' mes quat' voluptés dans ses quartiers d' noblesse, M'a sournois'ment passé, sur son divan de soi', Des parasit's du plus bas étage qui soit... Sous prétexte de bruit, sous couleur de réclame, Ai-j' le droit de ternir l'honneur de cette dame En criant sur les toits, et sur l'air des lampions : " Madame la marquis' m'a foutu des morpions ! " ? Le ciel en soit loué, je vis en bonne entente Avec le Pèr' Duval, la calotte chantante, Lui, le catéchumène, et moi, l'énergumèn', Il me laisse dire merd', je lui laiss' dire amen, En accord avec lui, dois-je écrir' dans la presse Qu'un soir je l'ai surpris aux genoux d' ma maîtresse, Chantant la mélopé' d'une voix qui susurre, Tandis qu'ell' lui cherchait des poux dans la tonsure ? Avec qui, ventrebleu ! faut-il que je couche Pour fair' parler un peu la déesse aux cent bouches ? Faut-il qu'un' femme célèbre, une étoile, une star, Vienn' prendre entre mes bras la plac' de ma guitar' ? Pour exciter le peuple et les folliculaires, Qui'est-c' qui veut me prêter sa croupe populaire, Qui'est-c' qui veut m' laisser faire, in naturalibus, Un p'tit peu d'alpinism' sur son mont de Vénus ? Sonneraient-ell's plus fort, ces divines trompettes, Si, comm' tout un chacun, j'étais un peu tapette, Si je me déhanchais comme une demoiselle Et prenais tout à coup des allur's de gazelle ? Mais je ne sache pas qu'ça profite à ces drôles De jouer le jeu d' l'amour en inversant les rôles, Qu'ça confère à ma gloire un' onc' de plus-valu', Le crim' pédérastique, aujourd'hui, ne pai' plus. Après c'tour d'horizon des mille et un' recettes Qui vous val'nt à coup sûr les honneurs des gazettes, J'aime mieux m'en tenir à ma premièr' façon Et me gratter le ventre en chantant des chansons. Si le public en veut, je les sors dare-dare, S'il n'en veut pas je les remets dans ma guitare. Refusant d'acquitter la rançon de la gloir', Sur mon brin de laurier je m'endors comme un loir. La Guerre de 14-18 Depuis que l'homme écrit l'Histoire, Depuis qu'il bataille à coeur joie Entre mille et une guerr' notoires, Si j'étais t'nu de faire un choix, A l'encontre du vieil Homère, Je déclarais tout de suit' : " Moi, mon colon, cell' que j' préfère, C'est la guerr' de quatorz'-dix-huit ! " Est-ce à dire que je méprise Les nobles guerres de jadis, Que je m' souci' comm' d'un' cerise De celle de soixante-dix ? Au contrair', je la révère Et lui donne un satisfecit Mais, mon colon, celle que j' préfère, C'est la guerr' de quatorz'-dix-huit ! Je sais que les guerriers de Sparte Plantaient pas leurs epé's dans l'eau, Que les grognards de Bonaparte Tiraient pas leur poudre aux moineaux... Leurs faits d'armes sont légendaires, Au garde-à-vous, je les félicit', Mais, mon colon, celle que j' préfère, C'est la guerr' de quatorz'-dix-huit ! Bien sûr, celle de l'an quarante Ne m'as pas tout a fait déçu, Elle fut longue et massacrante Et je ne crache pas dessus, Mais à mon sens, elle ne vaut guère, Guèr' plus qu'un premier accessit, Moi, mon colon, celle que j' préfère, C'est la guerr' de quatorz'-dix-huit ! Mon but n'est pas de chercher noise Au guérillas, non, fichtre ! non, Guerres saintes, guerres sournoises, Qui n'osent pas dire leur nom, Chacune a quelque chos' pour plaire, Chacune a son petit mérit', Mais, mon colon, celle que j' préfère, C'est la guerr' de quatorz'-dix-huit ! Du fond de son sac à malices, Mars va sans doute, à l'occasion, En sortir une - un vrai délice ! - Qui me fera grosse impression... En attendant je persévère A dir' que ma guerr' favorit', Cell', mon colon, que j' voudrais faire, C'est la guerr' de quatorz'-dix-huit ! La Marguerite La petite Marguerite Est tombé', Singulière, Du bréviaire De l'abbé. Trois pétales De scandale Sur l'autel, Indiscrète Pâquerette, D'où vient-ell' ? Dans l'enceinte Sacro-sainte, Quel émoi ! Quelle affaire, Oui, ma chère, Croyez-moi ! La frivole Fleur qui vole, Arrive en Contrebande Des plat's-bandes Du couvent. Notre Père Qui, j'espère, Etes aux cieux, N'ayez cure Des murmures Malicieux. La légère Fleur, peuchère ! Ne vient pas De nonnettes, De cornettes En sabbat. Sachez, diantre ! Qu'un jour, entre Deux ave, Sur la pierre D'un calvaire Il l'a trouvé'. Et l'a mise, Chose admise Par le ciel, Sans ambages, Dans les pages Du missel. Que ces messes Basses cessent, Je vous en prie. Non, le prête N'est pas traître A Marie. Que personne Ne soupçonne, Puis jamais, La petite Marguerite, Ah ! ça mais... Jeanne Chez Jeanne, la Jeanne, Son auberge est ouverte aux gens sans feu ni lieu, On pourrait l'appeler l'auberge de Bon Dieu S'il n'en existait pas une, La dernière où l'on peut entrer Sans frapper, sans montrer patte blanche... Chez Jeanne, la Jeanne, On est n'importe qui, on vient n'importe quand, On est n'importe qui, on vient n'importe quand, Et, comme par miracle, par enchantement, On fait parti' de la famille, Dans son coeur, en s' poussant un peu, Reste encore une petite place... La Jeanne, la Jeanne, Elle est pauvre et sa table est souvent mal servie, Le Grand Pan Du temps que régnait le Grand Pan, Les dieux protégaient les ivrognes Des tas de génies titubants Au nez rouge, à la rouge trogne. Dès qu'un homme vidait les cruchons, Qu'un sac à vin faisait carousse Ils venaient en bande à ses trousses Compter les bouchons. La plus humble piquette était alors bénie, Distillée par Noé, Silène, et compagnie. Le vin donnait un lustre au pire des minus, Et le moindre pochard avait tout de Bacchus. Refrain. Mais en se touchant le crâne, en criant " J'ai trouvé " La bande au professeur Nimbus est arrivée Qui s'est mise à frapper les cieux d'alignement, Chasser les Dieux du Firmament. Aujourd'hui ça et là, les gens boivent encore, Et le feu du nectar fait toujours luire les trognes. Mais les dieux ne répondent plus pour les ivrognes. Bacchus est alcoolique, et le grand Pan est mort. Quand deux imbéciles heureux S'amusaient à des bagatelles, Un tas de génies amoureux Venaient leur tenir la chandelle. Du fin fond du champs élysées Dès qu'ils entendaient un " Je t'aime ", Ils accouraient à l'instant même Compter les baisers. La plus humble amourette Etait alors bénie Sacrée par Aphrodite, Eros, et compagnie. L'amour donnait un lustre au pire des minus, Et la moindre amoureuse avait tout de Vénus. Au refrain. Aujourd'hui ça et là, les coeurs battent encore, Et la règle du jeu de l'amour est la même. Mais les dieux ne répondent plus de ceux qui s'aiment. Vénus s'est faite femme, et le grand Pan est mort. Et quand fatale sonnait l'heure De prendre un linceul pour costume Un tas de génies l'oeil en pleurs Vous offraient des honneurs posthumes. Et pour aller au céleste empire, Dans leur barque ils venaient vous prendre. C'était presque un plaisir de rendre Le dernier soupir. La plus humble dépouille était alors bénie, Embarquée par Caron, Pluton et compagnie. Au pire des minus, l'âme était accordée, Et le moindre mortel avait l'éternité. Au refrain. Aujourd'hui ça et là, les gens passent encore, Mais la tombe est hélas la dernière demeure Les dieux ne répondent plus de ceux qui meurent. La mort est naturelle, et le grand Pan est mort. Et l'un des dernier dieux, l'un des derniers suprêmes, Ne doit plus se sentir tellement bien lui-même Un beau jour on va voir le Christ Descendre du calvaire en disant dans sa lippe " Merde je ne joue plus pour tous ces pauvres types. J'ai bien peur que la fin du monde soit bien triste. " Le Blason Ayant avecques lui toujours fait bon mÉnage J'eusse aimÉ cÉlÉbrer sans Être inconvenant Tendre corps fÉminin ton plus bel apanage Que tous ceux qui l'ont vu disent hallucinant. CeÛt ÉtÉ mon ultime chant mon chant du cygne Mon dernier billet doux mon message d'adieu Or malheureusement les mots qui le dÉsignent Le disputent À l'exÉcrable À l'odieux. C'est la grande pitiÉ de la langue franÇaise C'est son talon d'Achille et c'est son dÉshonneur De n'offrir que des mots entachÉs de bassesse A cette incomparable instrument de bonheur. Alors que tant de fleurs ont des noms poÉtiques Tendre corps fÉminin' c'est fort malencontreux Que la fleur la plus douce la plus Érotique Et la plus enivrante en ait de plus scabreux. Mais le pire de tous est un petit vocable De trois lettres pas plus familier coutumier Il est inexplicable il est irrÉvocable Honte À celui-lÀ qui l'employa le premier Honte À celui-lÀ qui par dÉpit par gageure Dota de mÊme terme en son fiel venimeux Ce grand ami de l'homme et la cinglante injure Celui-lÀ c'est probable en Était un fameux. Misogyne À coup sÛr asexuÉ sans doute Au charmes de VÉnus absolument rÉtif Etait ce bougre qui toute honte bue toute Fit ce rapprochement d'ailleurs intempestif. La malpeste soit de cette homonymie C'est injuste madame et c'est dÉsobligeant Que ce morceau de roi de votre anatomie Porte le mÊme nom qu'une foule de gens. Fasse le ciel dans un trait de gÉnie Un poÈte inspirÉ que PÉgase soutient Donne en effaÇant d'un coup des siÈcles d'avanie A cette vraie merveille un joli nom chrÉtien En attendant madame il semblerait dommage Et vos adorateurs en seraient tous peinÉs D'aller perdre de vue que pour lui rendre hommage Il est d'autre moyen et que je les connais Et que je les connais. La non-demande en mariage Ma mi', de grÂce, ne mettons Pas sous la gorge À Cupidon Sa propre flÈche, Tant d'amoureux l'ont essayÉ Qui, de leur bonheur, ont payÉ Ce sacrilÈge... Refrain j'ai l'honneur de Ne pas te demander ta main, Ne gravons pas Nos noms au bas D'un parchemin. Laissons le champs libre au oiseaux, Nous seront tous les deux priso- nniers sur parole, Au diable, les maÎtresses queux Qui attachent les coeurs aux queu's Des casseroles! refrain VÉnus se fait vielle souvent elle perd son latin devant La lÈchefrite A aucun prix, moi je ne veux Effeuiller dans le pot-au-feu La marguerite. refrain On leur Ôte bien des attraits, En dÉvoilant trop les secrets De MÉlusine. L'encre des billets doux pÂlit Vite entre les feuillets des li- vres de cuisine. refrain Il peut sembler de tout repos De mettre À l'ombre, au fond d'un pot De confiture, La joli' pomme dÉfendu', Mais elle est cuite, elle a perdu Son goÛt "nature". refrain De servante n'ai pas besoin, Et du mÉnage et de ses soins Je t'en dispense... Qu'en Éternelle fiancÉe, A la dame de mes pensÉe' Toujours je pense... refrain Chanson pour l'Auvergna Elle est À toi cette chanson Toi l'Auvergnat qui sans faÇon M'as donnÉ quatre bouts de bois Quand dans ma vie il faisait froid Toi qui m'as donnÉ du feu quand Les croquantes et les croquants Tous les gens bien intentionnÉs M'avaient fermÉ la porte au nez Ce n'Était rien qu'un feu de bois Mais il m'avait chauffÉ le corps Et dans mon Âme il brÛle encore A la maniÈr' d'un feu de joie. Toi l'auvergnat quand tu mourras Quand le croqu'mort t'emportera Qu'il te conduise À travers ciel Au pÈre Éternel. Elle est À toi cette chanson Toi l'hÔtesse qui sans faÇon M'as donnÉ quatre bouts de pain Quand dans ma vie il faisait faim Toi qui m'ouvris ta huche quand Les croquantes et les croquants Tous les gens bien intentionnÉs S'amusaient a me voir jeÛner Ce n'Était rien qu'un peu de pain Mais il m'avait chauffÉ le corps Et dans mon Âme il brÛle encore A la maniÈr' d'un grand festin. Toi l'hÔtesse quand tu mourras Quand le croqu'mort t'emportera Qu'il te conduise À travers ciel Au pÈre Éternel. Elle est À toi cette chanson Toi l'Étranger qui sans faÇon D'un air malheureux m'as souri Lorsque les gendarmes m'ont pris Toi qui n'as pas applaudi quand Les croquantes et les croquants Tous les gens bien intentionnÉs Riaient de me voir emmener Ce n'Était rien qu'un peu de miel Mais il m'avait chauffÉ le corps Et dans mon Âme il brÛle encore A la maniÈr' d'un grand soleil. Toi l'Étranger quand tu mourras Quand le croqu'mort t'emportera Qu'il te conduise À travers ciel Au pÈre Éternel. Les copains d'abord Non ce n'Était pas le radeau De la mÉduse ce bateau Qu'on se le dis' au fond des ports Dis' au fond des ports Il naviguait en PÈr' Penard Sur la grand-mare des canards Et s'appelait les copains d'abord Les copains d'abord. Ses fluctuant nec mergitur C'Était pas d' la littÉratur' N'en dÉplais' au jeteur de sort Au jeteur de sort Son capitaine et ses matelots N'Étaient pas des enfants d' salaud Mais des amis franco de port Des copains d'abord. C'Étaient pas des amis de lux' Des petits Castor et Pollux Des gens de Sodom' et Gomorrh' Sodom' et Gomorrh' C'Étaient pas des amis choisis Par Montaigne et La BoÉtie Sur le ventre il se tapaient fort Les copains d'abord. C'Étaient pas des anges non plus L'Évangil' ils l'avaient pas lu Mais ils s'aimaient tout's voil's dehors Toutes voil's dehors Jean Pierre Paul compagnie C'Était leur seule litanie Leur CrÉdo leur Confiteor Aux copains d'abord. Au moindre coup de Trafalgar C'est l'amitiÉ qui prenait l' quart Cest ell' qui leur montrait le nord Leur montrait le nord Et quand ils Étaient en dÉtress' Qu' leurs bras lanÇaient des S.O.S. On aurait dit des sÉmaphores Les copains d'abord. Au rendez-vous des bons copains Y avait pas souvent de lapins Quand l'un d'entre eux manquait À bord C'est qu'il Était mort Oui mais jamais au grand jamais Son trou dans l'eau n' se refermait Cent ans aprÈs coquin de sort Il manquait encor. Des bateaux j'en ai pris beaucoup Mais le seul qui ait tenu le coup Qui n'ait jamais virÉ de bord Mais virÉ de bord Navigait en PÈre PÉnard Sur la grand-mare des canards Et s'app'lait les copains d'abord Les copains d'abord. Les sabots d'HÉlÈne Les sabots d'HÉlÈne Etaient tout crottÉs Les trois capitaines l'auraient appelÉe vilaine Et la pauvre HÉlÈne Etait comme une Âme en peine Ne cherche plus longtemps la fontaine Toi qui as besoin d'eau Ne cherche plus, aux larmes d'HÉlÈne Va-t'en remplir ton seau Moi j'ai pris la peine De les dÉchausser Les sabots d'HÉlÈn' moi qui ne suis pas capitaine Et j'ai vu ma peine Bien rÉcompensÉe. Dans les sabots de la pauvre HÉlÈne Dans ses sabots crottÉs Moi j'ai trouve les pieds d'une reine Et je les ai gardÉs. Son jupon de laine Etait tout mitÉ Les trois capitaines l'auraient appelÉe vilaine Et la pauvre HÉlÈne Etait comme une Âme en peine Ne cherche plus longtemps la fontaine Toi qui as besoin d'eau Ne cherche plus, aux larmes d'HÉlÈne Va-t'en remplir ton seau Moi j'ai pris la peine De le retrousser Le jupon d'HÉlÈn' moi qui ne suis pas capitaine Et j'ai vu ma peine Bien rÉcompensÉe. Sous les jupons de la pauvre HÉlÈne Sous son jupon mitÉ Moi j'ai trouve des jambes de reine Et je les ai gardÉs. Et le coeur d'HÉlÈne Savait pas chanter Les trois capitaines l'auraient appelÉe vilaine Et la pauvre HÉlÈne Etait comme une Âme en peine Ne cherche plus longtemps la fontaine Toi qui as besoin d'eau Ne cherche plus, aux larmes d'HÉlÈne Va-t'en remplir ton seau Moi j'ai pris la peine De m'y arreter Dans le coeur d'HÉlÈn' moi qui ne suis pas capitaine Et j'ai vu ma peine Bien rÉcompensÉe. Dans le coeur de la pauvre HÉlÈne Qu'avait jamais chantÉ Moi j'ai trouve l'amour d'une reine Et je l'ai gardÉ. Une jolie fleur Jamais sur terre il n'y eut d'amoureux Plus aveugle que moi dans tous les Âges Mais faut dir' qu' je m'Était creuvÉ les yeux En regardant de trop prÈs son corsage. Refrain Un' jolie fleur dans une peau d' vache Un' jolie vach' dÉguisÉe en fleur Qui fait la belle et qui vous attache Puis, qui vous mÈn' par le bout du coeur. Le ciel l'avait pourvue des mille appas Qui vous font prendre feu dÈs qu'on y touche L'en avait tant que je ne savais pas Ne savais plus oÙ donner de la bouche. Ell' n'avait pas de tÊte, ell' n'avait pas L'esprit beaucoup plus grand qu'un dÉ À coudre Mais pour l'amour on ne demande pas Aux fille d'avoir inventÉ la poudre. Puis un jour elle a pris la clef des champs En me laissant À l'Âme un mal funeste Et toutes les herbes de la Saint-Jean N'ont pas pu me guÉrir de cette peste. J' lui en ai bien voulu mais À prÉsent J'ai plus d' rancune et mon coeur lui pardonne D'avoir mis mon coeur À feu et À sang Pour qu'il ne puisse plus servir À personne. Je me suis fait tout petit Je n'avait jamais ÔtÉ mon chapeau Devant personne Maintenant je rampe et je fait le beau Quand ell' me sonne J'Étais chien mÉchant ell' me fait manger Dans sa menotte J'avais des dents d' loup, je les ai changÉes Pour des quenottes! Refrain Je m' suis fait tout p'tit devant un' poupÉe Qui ferm' les yeux quand on la couche Je m' suis fait tout p'tit devant un' poupÉe Qui fait Maman quand on la touche. J'Était dur À cuire ell' m'a converti La fine bouche Et je suis tombÉ tout chaud, rÔti Contre sa bouche Qui a des dents de lait quand elle sourit Quand elle chante Et des dents de loup, quand elle est furie Qu'elle est mÉchante. (refrain) Je subis sa loi, je file tout doux Sous son empire Bien qu'ell' soit jalouse au-delÀ de tout Et meme pire Un' jolie pervench' un jour en mourut A coup d'ombrelle. (refrain) Tous les somnambules, tous les mages m'ont Dit sans malice Qu'en ses bras croix, je subirais mon Dernier supplice Il en est de pir's li en est d' meilleur's Mais À tout prendre Qu'on se pende ici, qu'on se pende ailleurs S'il faut se pendre. (refrain) Auprès de mon arbre AuprÈs de mon arbre, Je vivais heureux J'aurais jamais dÛ m'Éloigner d' mon arbre AuprÈs de mon arbre, Je vivais heureux J'aurais jamais dÛ le quitter des yeux. J'ai plaquÉ mon chÊne Comme un saligaud Mon copain le chÊne Mon alter ego On Était du mÊme bois Un peu rustique un peu brute Dont on fait n'importe quoi Sauf naturell'ment les flÛtes J'ai maint'nant des frÊnes Des arbr's de judÉe Tous de bonne graine De haute futaie Mais toi tu manque À l'appel Ma vieille branche de campagne Mon seul arbre de NoËl Mon mÂt de cocagne. refrain) Je suis un pauvr' type J'aurais plus de joie J'ai jetÉ ma pipe Ma vieill' pipe en bois Qu'avait fumÉ sans s' fÂcher Sans jamais m'brÛlÉ la lippe L' tabac d' la vache enragÉe Dans sa bonn' vieill' tÊt' de pipe J'ai des pip's d'Écume OrnÉes de fleurons De ces pip's qu'on fume En levant le front Mais j' retrouv'rai plus ma foi Dans mon coeur ni sur ma lippe Le goÛt d' ma vieill' pip' en bois SacrÉ nom d'un' pipe. (refrain) Le surnom d'infÂme Me va comme un gant D'avecques ma femme J'ai foutu le camp Parc' que depuis tant d'annÉes C'Était un' sinÉcure De lui voir tout l' temps le nez Au milieu de la figure Je bas la campagne Pour dÉnicher la Nouvelle compagne Valant celles-lÀ Qui, bien sÛr, laissait beaucoup Trop de pierr's dans les lentilles Mais se pendait À mon cou Quand j' perdais mes billes. (refrain) J'avais un' mansarde Comme logement Avec des lÉzardes Sur le firmament Je l'savais par coeur depuis Et pour un baiser la course J'emmenais mes bell's de nuits Faire u tour sur la grande ourse J'habit' plus d' mansarde Il peut dÉsormais Tomber des hall'bardes Je m'en bats l'oeil mais, Mais si quelqu'un monte aux cieux Moins que moi j'y paie des prunes Y a cent sept ans qui dit mieux, Qu' j'ai pas vu la lune! (au refrain) Marinette Quand j'ai couru chanter ma p'tite chanson pour Marinette La belle, la traÎtresse Était allÉe À l'opÉra Avec ma p'tit chanson, j'avais l'air d'un con ma mÈre, Avec ma p'tit chanson, j'avais l'air d'un con. Quand j'ai couru porte mon pot d' moutarde À Marinette La belle, la traÎtresse avait dÉjÀ fini d' dÎner Avec mon petit pot, j'avais l'air d'un con ma mÈre, Avec mon petit pot, j'avais l'air d'un con. Quand j'offris pour Étrennes un' bicyclette À Marinette La belle, la traÎtresse avait achetÉ une auto, Avec mon p'tit vÉlo, j'avais l'air d'un con ma mÈre, Avec mon p'tit vÉlo, j'avais l'air d'un con. Quand j'ai couru tout chose au rendez-vous de Marinette La bell' disait: "J' t'adore" À un sal' typ' qui l'embrassait Avec mon bouquet d' fleurs, j'avais l'air d'un con ma mÈre, Avec mon bouquet d' fleurs, j'avais l'air d'un con. Quand j'ai couru brÛler la p'tit' cervelle À Marinette La belle etait dÉjÀ morte d'un rhume mal placÉ, Avec mon rÉvolver, j'avais l'air d'un con ma mÈre, Avec mon rÉvolver, j'avais l'air 6 Quand j'ai couru lugubre À l'enterr'ment de Marinette La belle, la traÎtresse Était dÉjÀ rÉssuscitÉe Avec ma p'tit couronn', j'avais l'air d'un con ma mÈre, Avec ma p'tit couronn', j'avais l'air d'un con. La ballade des gens qui sont nÉs quelque part C'est qui sont plaisant tous ces petits villages Tous ces bourg ces hameaux ces lieux-dits ces citÉs Avec leurs chÂteau forts leurs Églises leurs plages Ils n'ont qu'un seul point faible et c'est Être habitÉs E c'est Être habitÉs par des qui regardent Le reste avec mÉpris du haut de leurs remparts La race des chauvins des porteurs de cocardes Les imbÉciles heureux qui sont nÉs quelque part Les imbÉciles heureux qui sont nÉs quelque part. Maudits soient ces enfants de leur mÈre patrie EmpalÉs une fois pour toute sur leur clocher Qui vous montrent leurs tours leurs musÉes leur mairie Vous font voir du pays natal jusqu'À loucher Qu'ils sortent de Paris ou de Rome ou de SÈte Ou du diable vauvert ou de Zanzibar Ou mÊme de Montcuq il s'en flattent mazette Les imbÉciles heureux qui sont nÉs quelque part Les imbÉciles heureux qui sont nÉs quelque part. Le sable dans lequel douillettes leurs autruches Enfouissent la tÊte on trouve pas plus fin Quand À l'air qu'ils emploient pour gonfler leurs baudruches Leurs bulles de savon c'est du soufle divin Et petit À petit les voilÀ qui se montent Le cou jusqu'À penser que le crottin fait par Les chevaux mÊme en bois rend jaloux tout le monde Les imbÉciles heureux qui sont nÉs quelque part Les imbÉciles heureux qui sont nÉs quelque part. C'est pas un lieu commun celui de leur connaissance Ils plaignent de tout coeur les malchanceux Les petis maladroits qui n'eurent pas la prÉsence La prÉsence d'esprit de voir le jour chez eux Quand sonne le tocsin sur leur bonheur prÉcaire Contre les Étrangers tous plus ou moins barbares Ils sortent de leur trou pour mourir À la guerre Les imbÉciles heureux qui sont nÉs quelque part Les imbÉciles heureux qui sont nÉs quelque part. Mon dieu qu'il ferait bon sur la terre des hommes Si on y rencontrait cette race incongrue Cette race importune et qui partout fosonne La race des gens du terroir des gens du cru Que la vie serait belle en toutes circonstances Si vous n'aviez tirÉ du nÉant tous ces jobards Preuve peut-Être bien de votre inexistance Les imbÉciles heureux qui sont nÉs quelque part Les imbÉciles heureux qui sont nÉs quelque part. Fernande Une manie de vieux garÇon Moi j'ai pris l'habitude D'agrÉmnter ma sollitude Aux accents de cette chanson Refrain Quand je pense À Fernande Je bande, je bande Quand j' pense À Felicie Je bande aussi quand j' pense À LÉonor Mon dieu je bande encore Mais quand j' pense À Lulu LÀ je ne bande plus La bandaison papa Ca n' se commande pas. C'est une mÂle ritournelle Cette ancinne virile Qui retentit dans la guÉrite De la vaillance Éternelle. Afin de tromper son cafard De voir la vie moins terne Tout en veillant sur sa lanterne Chante ainsi le gardien de phare AprÈs la priÈre du soir Comme il est un peu triste Chante ainsi le sÉminariste A genoux sur son reposoire. A l'Etoile oÙ j'Était venu Pour ranimer la flamme J'entendis Émus jusqu'au larmes La voix du soldat inconnu. Et je vais mettre un point final A ce chant salutaire En suggÉrant au solitaire D'en faire un hymme national. Sauf le respect que je vous dois  Si vous y tenez tant parlez-moi des affaires publiques Encor que ce sujet me rende un peu mÉlancolique Parlez-m'en toujours je n' vous en tiendrai pas rigueur Parlez-moi d'amour et j' vous fous mon poing sur la gueule Sauf le respect que je vous dois. Fi des chantres bÊlant qui taquine la muse Érotique Des poÈtes galants qui lÈchent le cul d'Aphrodite Des auteurs courtois qui vont en se frappant le c?ur Parlez-moi d'amour et j' vous fous mon poing sur la gueule Sauf le respect que je vous dois. NaguÈre mes idÉe reposaient sur la non-violence Mon agressivitÉ je l'avait rÉduite au silence Mais tout tourne court ma compagne Était une gueuse Parlez-moi d'amour et j' vous fous mon poing sur la gueule Sauf le respect que je vous dois. Ancienne enfant trouvÉe n'ayant connu pÈre ni mÈre CoiffÉe d'un chap'ron rouge ell' s'en fut ironie amÈre Porter soi_-disant une galette À son aÏeule Parlez-moi d'amour et j' vous fous mon poing sur la gueule Sauf le respect que je vous dois. Je l'attendis un soir je l'attendis jusqu'À l'aurore Je l'attendis un an pour peu je l'attendrais encore Un loup de rencontre aura sÉduite cette gueuse Parlez-moi d'amour et j' vous fous mon poing sur la gueule Sauf le respect que je vous dois. Cupidon ce salaup geste chez lui qui n'est pas rare Avais trenpÉ sa flÈche un petit peu dans le curare Le philtre magique avait tout du bouillon d'onzes heures Parlez-moi d'amour et j' vous fous mon poing sur la gueule Sauf le respect que je vous dois. Ainsi qu'il est frÉquent sous la blancheur de ses pÉtales La marguerite cachait une tarentule un crotale Une vraie vipÈre À la fois lubrique et visqueuse Parlez-moi d'amour et j' vous fous mon poing sur la gueule Sauf le respect que je vous dois. Que le septiÈme ciel sur ma pauvre tÊte retombe Lorsque le dÉsespoir m'aura mis au bord de la tombe Cet ultime discours s'exhalera de mon linceul Parlez-moi d'amour et j' vous fous mon poing sur la gueule Sauf le respect que je vous dois. Le petit joueur de flÛteau  Le petit joueur de flÛteau Menait la musique au chÂteau Pour la grÂce de ses chansons Le roi lui offrit un blason Je ne veux pas Être noble RÉpondit lecroque-note Avec un blason À la clÉ Mon la se mettrait À gonfler On dirait par tout le pays Le joueur de flÛte a trahi Et mon pauvre petit clocher Me semblerait trop bas perchÉ Je ne plierais plus les genoux Devant le bon Dieu de chez nous Il faudrait À ma grande Âme Tous les saints de Notre-Dame Avec un ÉvÊque À la clÉ Mon la se metrait À gonfler On dirait par tout le pays Le joueur de flÛte a trahi Et la chambre oÙ j'ai vu la jour Me serait un triste sÉjour Je quitterai mon lit mesquin Pour une couche À baldaquin Je changerais ma chaumiÈre Pour une gentilhommiÈre Avec un manoir À la clÉ On dirait par tout le pays Le joueur de flÛte a trahi Je serai honteux de mon sang Des aÏeux de qui je descends On me verrait bouder dessus La branche dont je suis issu Je voudrais un magnifique Arbre gÉnÉalogique Avec du sang bleu a la clÉ Mon la se mettrait a gonfler On dirait par tout le pays Le joueur de flÛte a trahi Je ne voudrais plus Épouser Ma promise ma fiancÉe Je ne donnerais pas mon nom A une quelconque Ninon Il me faudrait pour compagne La fille d'un grand d'Espagne Avec un' princesse À la clÉ Mon la se mettrait À gonfler On dirait par tout le pays Le joueur de flÛte a trahi Le petit joueur de flÛteau Fit la rÉvÉrence au chÂteau Sans armoiries sans parchemin Sans gloire il se mit en chemin Vers son clocher sa chaumine Ses parents et sa promise Nul ne dise dans le pays Le joueur de flÛte a trahi Et Dieu reconnaisse pour sien Le brave petit musicien Le grand chÊne  Il vivait en dehors des chemin forestier, Ce n'Était nullement un arbre de mÉtier, Il n'avait jamais vu l'ombre d'un bÛcheron, Ce grand chÊne fier sur son tronc. Il eÛt connu des jours filÉs d'or et de soie Sans ses proches voisins, les pires gens qui soient; Des roseaux mal pensant, pas mÉme des bambous, S'amusant À le mettre À bout. Du matin jusqu'au soir ces petit rejetons, Tout juste cann' À pÊch', À peine mirlitons, Lui tournant tout autour chantaient, in extenso, L'histoire du chÊne et du roseau. Et, bien qu'il fÛt en bois, les chÊnes, c'est courant, La fable ne le laissait pas indiffÉrent. Il advin que lassÉ d'Être en but aux lazzi, Il se rÉsolue À l'exi. A grand-peine il sortit ses grands pieds de son trou Et partit sans se retourner ni peu ni prou. Mais, moi qui l'ai connu, je sais qu'il souffrit De quitter l'ingrate patri'. Le petit cheval Le p'tit ch'val dans le mauvais temps Qu'il avait donc du courrage! C'Était un petit cheval blanc Tous derriÈre, tous derriÈre C'Était un petit cheval blanc Tous derriÈre et lui devant! Il n'y avait jamais d' beau temps Dans ce pauvre paysage! Il n'y avait jamais d' printemps Ni derriÈre, ni derriÈre, Il n'y avait jamais d' printemps Ni derriÈre ni devant! Mais toujours il Était content Menant les gars du village A travers la pluie noire des champs Tous derriÈre, tous derriÈre A travers la pluie noire des champs Tous derriÈre et lui devant! Sa voiture allait poursuivant Sa bell' petit' queue sauvage C'est alors qu'il Était content Tous derriÈre, tous derriÈre C'est alors qu'il Était content Tous derriÈre et lui devant! Mais un jour dans le mauvais temps, Un jour qu'il Était sage Il est mort par un Éclair blanc Tous derriÈre, tous derriÈre Il est mort par un Éclair blanc Tous derriÈre et lui devant! Il est mort sans voir le beau temps Qu'il avait donc du courrage! Il est mort sans voir le printemps Ni derriÈre, ni derriÈre Il est mort sans voir le printemps Ni derriÈre, ni devant! Paul FORT Ballade des dames du temps jadis  Dites moy ou, n'en quel pays Est Flora la belle Romaine, Archipiades, nÉ ThaÏs Qui fut sa cousine germaine, Echo parlant quand bruyt on maine Dessus riviÈre ou sus estan Qui beaultÉ ot trop plus qu'humaine. Mais ou sont les neiges d'antan? Qui beaultÉ ot trop plus qu'humaine. Mais ou sont les neiges d'antan? Ou est trÈs sage HÉlloÏs, Pour qui chastrÉ fut et puis moyne Pierre Esbaillart a Saint Denis? Pour son amour ot ceste essoyne. Semblablement, ou est royne Qui commanda que buridan Fut getÉ en ung sac en Saine? Mais ou sont les neiges d'antan? Fut getÉ en ung sac en Saine? Mais ou sont les neiges d'antan? La royne blanche comme lis Qui chantoit a voix de seraine, Berte au grand piÉ, Bietris, Alis Haremburgis qui tient le Maine, Et Jehanne la bonne Lorraine Qu'Englois br^ulÈrent a Rouan; Ou sont ilz, ou Vierge souveraine? Mais ou sont les neiges d'antan? Ou sont ilz, ou Vierge souveraine? Mais ou sont les neiges d'antan? Prince, n'enquÉrez de sepmaine Ou elles sont, ne de cest an, Qu'a ce refrain ne vous remaine: Mais ou sont les neiges d'antan? Qu'a ce refrain en vous remaine; Mais ou sont les neiges d'antan? FranÇois Villon Il n'y a pas d'amour heureux Rien n'est jamais acquis À l'homme Ni sa force Ni sa faiblesse ni son coeur. Et quand il croit Ouvrir ses bras son ombre est celle d'une croix. Et quand il croit serrer son bonheur il le broie Sa vie est un Étrange et douloureux divorce Il n'y a pas d'amour heureux. Sa vie Elle ressemble À ces soldats sans armes Qu'on avait habillÉs pour un autre destin A quoi peut leur servir de se lever matin Eux qu'on retrouve au soir dÉsoeuvrÉs incertains, Dites ces mots Ma vie Et retenez vos larmes Il n'y a pas d'amour heureux. Mon bel amour mon cher amour ma dÉchirure Je te porte dans moi comme un oiseau blÉssÉ Et ceux-lÀ sans savoir nous regarde passer RÉpÉtant aprÈs moi les mots que j'ai tressÉs Et qui pour tes grands yeux tout aussitÔt moururent Il n'y a pas d'amour heureux. Le temps d'apprendre À vivre il est dÉjÀ trop tard Que pleurent dans la nuit nos coeurs À l'unisson Ce qu'il faut de malheur pour la moindre chanson Ce qu'il faut de regrets pour payer un frisson Ce qu'il faut de sanglots pour un air de guitare Il n'y a pas d'amour heureux. Louis ARAGON. La marine  On les r'trouve en racourci Dans nos p'tits amours d'un jour, Tout's les joies, tous les soucis, Des amours qui dur'nt toujours C'est lÀ l'sort de la marine Et de tout's nos petit's chÉries. On accoste, vite un bec, Pour nos baisers, l'corps avec! Et les joies et les bouderies, Les fÂcheries, les bons retours, On les r'trouve en racourci Dans nos p'tits amours d'un jour. On a ri, on s'est baisÉ, sur les neun?ils, sur les nÉnÉs, Dans les ch'veux À pleins bÉcots Pondus comm' des ?ufs, tout chauds! Tout c'qu'on fait dans un seul jour Et comme on allonge le temps, Plus d'trois fois dans un seul jour, Content, pas content, content! Y a dans la chambre une odeur D'amour tendre et de goudron. Ca vous met la joies dans le c?ur La peine aussi et c'est bon. On n'est pas la pour causer, Mais on pens' mÊm' dans l'amour On pens' que d'main y f'ra jour Et qu'c'est un' calamitÉ. C'est lÀ l'sort de la marine, Et de tout's nos petit's chÉries, On accost' mais on devine Qu'Ça s'ra pas le paradis! On aura beau s'dÉpÉcher Fair' bon dieu, la pige au temps, Et l'bourrer d'tous nos pÊchÉs Ca n's'ra pas Ça et pourtant... Tout's les joies, tous les soucis, Des amours qui dur'nt toujours, On les r'trouvent en raccourci Dans nos p'tits amours d'un jour. Paul FORT. Corne d'Aurochs  Il avait nom corne d'Aurochs, au guÉ, au guÉ Tout l' mond' peut pas s'app'ler Durand, au guÉ, au guÉ En le regardant avec un oeil de poÈte, On aurait pu croire À son frontal de prophÈte, Qu'il avait les grand's eaux de Versaill's dans la tÊte Corne d'Aurochs. Mais que le bon dieu lui pardonne, au guÉ, au guÉ C'Étaient celles du robinet; au guÉ, au guÉ On aurait pu croire en l' voyant penchÉ sur l'onde Qu'il se plongeait dans des mÉditations profondes, Sur l'aspect fugitif des choses de se monde Corne d'Aurochs. C'Étaient hÉlas pour s'assurer, au guÉ, au guÉ Qu' le vent n' l'avait pas dÉcoiffÉ, au guÉ, au guÉ Il proclamait À son de trompe À tous les carrefours "Il n'y a qu' les imbÉciles qui sachent bien faire l'amour, La virtuositÉ c'est une affaire de balourds!" Corne d'Aurochs. Il potassait À la chandelle, au guÉ, au guÉ Des traitÉs de maitien sexuel, au guÉ, au guÉ Et sur les femm's nues des musÉes, au guÉ, au guÉ Faisait l' brouillon de ses baisers, au guÉ, au guÉ Et bientÔt petit À petit, au guÉ, au guÉ On a tout su, tout su de lui, au guÉ, au guÉ On a su qu'il Était enfant de la Patrie Qu'il Était incapable de risquer sa vie Pour cueillir un myosotis À une fille Corne d'Aurochs. Qu'il avait un p'tit cousin, au guÉ, au guÉ Haut placÉ chez les argousins, au guÉ, au guÉ Et que les jours de pÉnurie, au guÉ, au guÉ Il prenait ses repas chez lui, au guÉ, au guÉ C'est mÊme en revenant d' chez cet antipathique Qu'il tomba victime d'une indigestion critique Et refusa l' secours de la thÉrapeutique Corne d'Aurochs. Parce que c'Était un All'mand, au guÉ, au guÉ Qu'on devait le mÉdicament, au guÉ, au guÉ Il rendit comm' il put son Âme machinale Et sa vie n'ayant pas ÉtÉ originale L'Etat lui fit des funÉrailles nationales Corne d'Aurochs. Alors sa veuve en gÉmissant, au guÉ, au guÉ Coucha avec son remplaÇant, au guÉ, au guÉ. HÉcatombe  Au marchÉ de Briv'-la-Gaillarde A propos de bottes d'oignons, Quelques douzaines de gaillardes Se crÊpaient un jour le chignon. A pied, a cheval, en voiture, Les gendarmes mal inspirÉs Vinrent pour tenter l'aventure D'interrompre l'ÉchauffourÉe. Or, sous tous les cieux sans vergogne, C'est un usag' bien Établi, D's qu'il s'agit d' rosser les cognes Tout le monde se rÉconcilie. Ces furies perdant tout' mesure Se ruÈrent sur les guignols, Et donnÈrent je vous l'assure Un spectacle assez croquignol. En voyant ces braves pendores Etre À deux doigts de succomber, Moi, j' bichais car je les adore Sous la forme de macchabÉes De la mansarde oÙ je rÉside J'exitais les farouches bras Des mÉgÈres gendarmicides En criant: "Hip, hip, hip, hourra!" FrÉnÉtiqu' l'un' d'elles attache Le vieux marÉchal des logis Et lui fait crier: "Mort aux vaches, Mort aux lois, vive l'anarchie!" Une autre fourre avec rudesse Le crÂne d'un de ses lourdauds Entre ses gigantesques fesses Quelles serre comme un Étau. La plus grasse de ses femelles Ouvrant son corsage dilatÉ Matraque À grand coup de mamelles Ceux qui passe À sa portÉe. Ils tombent, tombent, tombent, tombent, Et s'lon les avis compÉtents Il paraÎt que cette hÉcatombe Fut la plus bell' de tous les temps. Jugeant enfin que leurs victimes Avaient eu leur content de gnons, Ces furies comme outrage ultime En retournant À leurs oignons, Ces furies À peine si j'ose Le dire tellement c'est bas, Leur auraient mÊm' coupÉ les choses Par bonheur ils n'en avait pas. Leur auraient mÊm' coupÉ les choses Par bonheur ils n'en avait pas. P... de toi  En ce temps-lÀ, je vivais dans la lune Les bonheurs d'ici-bas m'Étaient tous dÉfendus Je semais des violettes et chantais pour des prunes Et tendais la patte aux chats perdus. Refrain Ah ah ah ah putain de toi Ah ah ah ah ah ah pauvre de moi... Un soir de pluie v'lÀ qu'on gratte À ma porte Je m'empresse d'ouvrir, sans doute un nouveau chat! Nom de dieu l' beau fÉlin que l'orage m'apporte C'Était toi, c'Était toi, c'Était toi. Les yeux fendus et couleur pistache T'as posÉ sur mon coeur ta patte de velours Fort heureus'ment pour moi t'avais pas de moustache Et ta vertu ne pesait pas trop lourd. Au quatre coins de ma vie de bohÈme T'as prom'nÉ, t'as prom'nÉ le feu de tes vingt ans. Et pour moi, pour mes chats, pour mes fleurs, mes poÈmes C'Était toi la pluie et le beau temps... Mais le temps passe et fauche À l'aveuglette. Notre amour mÛrissait À peine que dÉjÀ, Tu brÛlais mes chansons, crachais sur mes viollettes, Et faisais des misaires À mes chats. Le comble enfin, misÉrable salope. Comme il n' restait plus rien dans le garde-manger, T'as couru sans vergogne, et pour une escalope, Te jeter dans le lit du boucher. C'Était fini, t'avais passÉ les bornes. Et, r'nonÇant aux amours frivoles d'ici-bas, J' suis r'montÉ dans la lune en emportant mes cornes, Mes chansons, et mes fleurs, et mes chats. Supplique pour être enterré sur une plage de Sète La camarde qui ne m'a jamais pardonne d'avoir seme des fleurs dans les trous de son nez me poursuit d'un zele imbecile Alors cerne de pres par les enterrements j'ai cru bon de remettre a jour mon testament de me payer un codicile Trempe dans l'encre bleue du golfe du lion trempe trempe ta plume o mon vieux tabellion et de ta plus belle ecriture Note ce qu'il faudrait qu'il advint de mon corps lorsque mon ame et lui ne seront plus d'accord que sur un seul point la rupture Quand mon ame aura prit son vol a l'horizon vers celles de gavroche et de mimi pinson celles des titis, des grisettes Que vers le sol natal mon corps soit ramene dans un sleeping du paris-mediterannee Terminus en plage de Sete Mon caveau de famille, helas n'est pas tout neuf vulgairement parlant il est plein comme un oeuf Et d'ici que quelqu'un n'en sorte Il risque de se faire tard et je ne peux Dire a ces brave gens, poussez vous donc un peu Place aux jeunes en quelque sorte=20 Juste au bord de la mer, a deux pas des flots bleus creusez si c'est possible un petit trou moelleux une bonne petite niche Aupres de mes amis d'enfance les dauphins le long de cette greve ou le sable est si fin sur la plage de la corniche C'est une plage ou m=EAme, a ses moments furieux Neptune ne se prend jamais trop au serieux Ou quand un bateau fait naufrage Le capitaine crie : je suis le maitr a bord Sauve qui peut! le vin et le pastis d'abord Chacun sa bonbonne et courage ! Et c'est la que jadis, a quinze ans revolus a l'age ou s'amuser tout seul ne suffit plus Je connus la prime amourette Aupres d'une sirene, une femme-poisson Je recus de l'amour la premiere lecon Avalai la premiere arete Deference gardee envers paul Valery Moi l'humble troubadour sur lui je rencheris Le bon maitre me le pardonne Et qu'au moins si ses vers valent mieux que les miens mon cimetiere soit plus marin que le sien Et n'en deplaise au autochtones Cette tombe en sandwich, entre le ciel et l'eau ne donnera pas une ombre triste au tableau Mais un charme indefinissable Les baigneuses s'en serviront de paravent Pour changer de tenue, et les petits enfants diront : Chouette un chateau de sable! Est-ce trop demander, sur mon petit lopin plantez, je vous en prie, une espece de pin pin parasol de preference Qui saura premunir contre l'insolation les bons amis venus faire sur ma concession d'affectueuses reverences Tantot venant d'espagne, et tantot d'italie tous charges de parfums, de musiques jolies le mistral et la tramontne Sur mon dernier sommeil verseront les echos de villanelle un jour, un jour de fandango de tarantelle, de sardane... Et quand prenant ma buette en guise d'oreiller une ondine viendra gentiment sommeiller Avec moins que rien de costume J'en demande pardon par avance a Jesus si l'ombre de ma crois s'y couche un peu dessus pour un petit bonheur posthume=20 Pauvres rois, pharaons! pauvre napoleon! Pauvres grands disparus gisant au pantheon pauvres cendres de consequence! Vous envierez un peu l'etenrel estivant qui fait du pedalo sur la vague en revant qui passe sa mort en vacances Vous envierez un peu l'etenrel estivant qui fait du pedalo sur la vague en revant qui passe sa mort en vacances Le mauvais sujet repenti Elle avait la taill' faite au tour, Les hanches pleines, Et chassait l' mÂle aux alentours De la Mad'leine... A sa faÇon d' me dir' : "Mon rat, Est-c' que j' te tente ?" Je vis que j'avais affaire À Un' dÉbutante... L'avait l' don, c'est vrai, j'en conviens, L'avait l' gÉnie, Mais sans technique, un don n'est rien Qu'un' sal' manie... Certes, on ne se fait pas putain Comme on s' fait nonne. C'est du moins c' qu'on prÊche, en latin, A la Sorbonne... Me sentant rempli de pitiÉ Pour la donzelle, J' lui enseignai, de son mÉtier, Les p'tit's ficelles... J' lui enseignai l' moyen d' bientÔt Faire fortune, En bougeant l'endroit oÙ le dos R'ssemble À la lune... Car, dans l'art de fair' le trottoir, Je le confesse, Le difficile est d' bien savoir Jouer des fesses... On n' tortill' pas son popotin D' la mÊm' maniÈre, Pour un droguiste, un sacristain, Un fonctionnaire... Rapidement instruite par Mes bons offices, Elle m'investit d'une part D' ses bÉnÉfices... On s'aida mutuellement, Comm' dit l' poÈte. Ell' Était l' corps, naturell'ment, Puis moi la tÊte... Un soir, À la suite de Manoeuvres douteuses, Ell' tomba victim' d'une Maladie honteuses... Lors, en tout bien, toute amitiÉ, En fille probe, Elle me passa la moitiÉ De ses microbes... AprÈs des injections aiguËs D'antiseptique, J'abandonnai l' mÉtier d' cocu SystÉmatique... Elle eut beau pousser des sanglots, Braire À tu'-tÊte, Comme je n'Étais qu'un salaud, J' me fis honnÊte... SitÔt privÉ' de ma tutell', Ma pauvre amie Courrut essuyer du bordel Les infamies... ParaÎt qu'ell' s' vend mÊme À des flics, Quell' dÉcadence ! Y'a plus d' moralitÉ publiqu' Dans notre France... La marche nuptiale Mariage d'amour, mariage d'argent, J'ai vu se marier toutes sortes de gens : Des gens de basse source et des grands de la terre, Des prÉtendus coiffeurs, des soi-disant notaires... Quand mÊme je vivrai jusqu'À la fin des temps, Je garderais toujours le souvenir content Du jour de pauvre noce oÙ mon pÈre et ma mÈre S'allÈrent Épouser devant Monsieur le Maire. C'est dans un char À boeufs, s'il faut parler bien franc, TirÉ par les amis, poussÉ par les parents, Que les vieux amoureux firent leurs Épousailles AprÈs long temps d'amour, long temps de fianÇailles. CortÈge nuptial hors de l'ordre courant, La foule nous couvait d'un oeil protubÉrant : Nous Étions contemplÉs par le monde futile Qui n'avait jamais vu de noces de ce style. Voici le vent qui souffle emportant, crÈve-coeur ! Le chapeau de mon pÈre et les enfants de choeur... VoilÀ la plui' qui tombe en pesant bien ses gouttes, Comme pour empÊcher la noc', coÛte que coÛte. Je n'oublierai jamais la mariÉe en pleurs BerÇant comme un' poupÉ' son gros bouquet de fleurs... Moi, pour la consoler, moi, de toute ma morgue, Sur mon harmonica jouant les grandes orgues. Tous les garÇons d'honneur, montrant le poing aux nues, Criaient : "Par Jupiter, la noce continue !" Par les homm's dÉcriÉ', par les dieux contrariÉs, La noce continue et Viv' la mariÉe ! Saturne Il est morne, il est taciturne, Il prÉside aux choses du temps, Il porte un joli nom, "Saturne", Mais c'est un dieu fort inquiÉtant. En allant son chemin morose, Pour se dÉsennuyer un peu, Il joue À bousculer les roses, Le temps tu' le temps comme il peut. Cette saison, c'est toi, ma belle, Qui as fait les frais de son jeu, Toi qui a payÉ la gabelle, Un grain de sel dans tes cheveux. C'est pas vilain, les fleurs d'automne, Et tous les poÈtes l'ont dit. Je te regarde et je te donne Mon billet qu'ils n'ont pas menti. Viens encor', viens ma favorite, Descendons ensemble au jardin, Viens effeuiller la marguerite De l'ÉtÉ de la Saint-Martin. Je sais par coeur toutes tes grÂces Et, pour me les faire oublier, Il faudra que Saturne en fasse Des tours d'horlog' de sablier ! Et la petit' pisseus' d'en face Peut bien aller se rhabiller. Misogynie à part Misogynie À part, le sage avait raison : il y a les emmerdant's, on en trouve À foison, En foule elles se pressent. Il y a les emmerdeus's, un peu plus raffinÉ's, Et puis, trÈs nettement au-dessus du panier, Y'a les emmerderesses. La mienne, À elle seul', sur tout's surenchÉrit, Ell' relÈve À la fois des trois catÉgori's, VÉritable prodige, Emmerdante, emmerdeuse, emmerderesse itou, Elle passe, ell' dÉpasse, elle surpasse tout, Ell' m'emmerde, vous dis-je. Mon Dieu, pardonnez-moi ces propos bien amers, Ell' m'emmerde, ell' m'emmerde, ell' m'emmerde, ell' m'emmer- de, elle abuse, elle attige. Ell' m'emmerde et j' regrett' mes bell's amours avec La p'tite enfant d' Mari que m'a soufflÉ' l'ÉvÊque, Ell' m'emmerde, vous dis-je. Ell' m'emmerde, ell' m'emmerde, et m'oblige À me cu- rer les ongles avant de confirmer son cul, Or, c'est pas callipyge. Et la charitÉ seul' pouss' sa main rÉsignÉ' Vers ce cul rabat-joi', conique, renfrognÉ, Ell' m'emmerde, vous dis-je. Ell' m'emmerde, ell' m'emmerde, je le rÉpÈte et quand Ell' me tape sur le ventre, elle garde ses gants, Et Ça me dÉsoblige. Outre que Ça dÉnote un grand manque de tact, Ca n' favorise pas tellement le contact, Ell' m'emmerde, vous dis-je. Ell' m'emmerde, ell' m'emmerd' , quand je tombe À genoux Pour cetain's dÉvotions qui sont bien de chez nous Et qui donn'nt le vertige, Croyant l'heure venu' de chanter le credo, Elle m'ouvre tout grand son missel sur le dos, Ell' m'emmerde, vous dis-je. Ell' m'emmerde, ell' m'emmerde, À la fornication Ell' s'emmerde, ell' s'emmerde avec ostentation, Ell' s'emmerde, vous dis-je. Au lieu de s'Écrier : "Encor ! Hardi ! Hardi !" Ell' dÉclam' du Claudel, du Claudel, j'ai bien dit, Alors Ça, Ça me fige. Ell' m'emmerde, ell' m'emmerd', j'admets que ce Claudel Soit un homm' de gÉnie, un poÈte immortel, J' reconnais son prestige, Mais qu'on aille chercher dedans son oeuvre pie, Un aphrodisiaque, non, Ça, c'est d' l'utopie ! Ell' m'emmerde, vous dis-je. La Messe au pendu disque 12 Anticlirical fanatique Gros mangeur d'icclisiastiques, Cet aveu me co[te beaucoup, Mais ces hommes d'Eglise, hilas ! Ne sont pas tous des digueulasses, Timoin le curi de chez nous. Quand la foule qui se dichanne Pendit un homme au bout d'un chjne Sans forme aucune de remords, Ce ratichon fit scandale Et rugit ` travers les stalles, "Mort ` toute peine de mort!" Puis, on le vit, itrange rite, Qui baptisait les marguerites Avec l'eau de son binitier Et qui prodiguait les hosties, Le pain binit, l'Eucharistie, Aux petits oiseaux du moutier. Ensuite, il retroussa ses manches, Prit son goupillon des dimanches Et, plein d'une sainte colhre, Il partit comme ` l'offensive Dire une grand' messe exclusive A celui qui dansait en l'air. C'est ` du gibier de potence Qu'en cette triste circonstance L'Hommage sacri fut rendu. Ce jour l`, le rtle du Christ(e), Bonne aubaine pour le touriste, Eti joui par un pendu. Et maintenant quand on croasse, Nous, les paoens de sa paroisse, C'est pas lui qu'on veut dipriser. Quand on crie "A bas la calotte" A s'en faire piter la glotte, La sienne n'est jamais visie. Anticliricaux fanatiques Gros mangeur d'icclisiastiques, Quand vous vous goinfrerez un plat De cureton, je vous exhorte, Camarades, ` faire en sorte Que ce ne soit pas celui-l`. Comme hier disque 1 Poème de Paul FORT Hi! donne moi ta bouche, hi! ma jolie fraise! L'aube ` mis des frais's plein notr' horizon Garde tes dindons, moi mes porc, Thirhse Ne r'pouss' pas du pied mes petits cochons. Va, comme hier! comme hier! comme hier! Si tu n' m'aimes point, c'est moi qui t'aim'rons L'un tient le couteau, l'autre la cuiller: La vie c'est toujours les mjmes chansons. Pour sauter le gros sourceau d'pierre en pierre, Comme tous les jours mes bras t'enlhv'ront Nos dindes, nos truies nous suivront lighres Ne r'pousse pas du pied mes petits cochons. Va, comme hier! comme hier! comme hier! Si tu n' m'aimes point, c'est moi qui t'aim'rons La vie c'est toujours amour et mishre La vie c'est toujours les mjmes chansons. J'ai tant de respect pour ton c?ur Thirhse, Et pour tes dindons. Quand nous nous aimons Quand nous nous fbchons, hi! ma jolie fraise Ne r'pousse pas du pied mes petits cochons. Va, comme hier! comme hier! comme hier! Si tu n' m'aimes point, c'est moi qui t'aim'rons L'un tient le couteau, l'autre la cuiller: La vie c'est toujours les mjmes chansons. Pensée des morts disque 10 Poème d'Alphonse DE LAMARTINE Voila les feuilles sans seve qui tombent sur le gazon voila le vent qui s'eleve et gemit dans le vallon voila l'errante hirondelle qui rase du bout de l'aile l'eau dormante des marais voila l'enfant des chaumieres qui glane sur les bruyeres le bois tombe des forets C'est la saison ou tout tombe aux coups redoubles des vents un vent qui vient de la tombe moissonne aussi les vivants ils tombent alors par mille comme la plume inutile que l'aigle abandonne aux airs lorsque des plumes nouvelles viennent rechauffer ses ailes a l'approche des hivers C'est alors que ma paupiere vous vit palir et mourir tendres fruits qu'a la lumiere dieu n'a pas laisse murir quoique jeune sur la terre je suis deja solitaire parmi ceux de ma saison et quand je dis en moi-meme "ou sont ceux que ton couer aime?" je regarde le gazon C'est un ami de l'enfance qu'aux jours sombres du malheur nous preta la providence pour appuyer notre coeur il n'est plus : notre ame est veuve il nous suit dans notre epreuve et nous dit avec pitie "ame si ton ame et pleine de ta joie ou de ta peine qui portera la moitie?" C'est une jeune fiancee qui, le front ceint du bandeau n'emporta qu'une pensee de sa jeunesse au tombeau Triste, helas ! dans le ciel meme pour revoir celui qu'elle aime elle revient sur ses pas et lui dit : "ma tombe est verte! sur cette terre deserte qu'attends-tu? je n'y suis pas!" C'est l'ombre pale d'un pere qui mourut en nous no